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 La rationalité

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Thierry
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MessageSujet: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeSam 14 Aoû - 19:00

Du jour au lendemain.
Le 14/08/2010 à 12:02

C'est le titre du film que nous avons regardé hier soir. Avec Benoit Poolvoerde.

Totalement désespérant...L'histoire d'un homme qui "du jour au lendemain" va voir sa vie passer d'un long marasme quotidien, avec une rupture sentimentale, une situation professionnelle humiliante et de multiples désagréments quotidiens à un bonheur parfait, sans aucune explication, sans avoir changé quoique ce soit en lui, une transformation totalement irrationnelle. Et cette absence d'explication va rendre pour lui ce bonheur totalement insupportable, il ne va pas s'y retrouver, l'image à laquelle il est attaché, dans laquelle il se reconnaît s'est effacée, les autres, ses proches, ne le voient plus de la même façon, tout ce qu'il vit est empli d'un bonheur immédiat, sans qu'il élabore le moindre projet, sans qu'il intervienne le moins du monde dans cette accumulation de situations positives. On sent alors, au fil des jours, que cette situation l'angoisse, qu'il semble attendre, guetter sans cesse l'instant où tout va s'arrêter, que ça ne peut pas continuer ainsi alors que rien ne l'explique...Cette disparition de ce qu'il était va le conduire à la folie...Alors que sa femme est revenue à ses côtés et qu'elle attend un bébé, il est interné en hôpital psychiatrique. C'est un homme inapte au bonheur et qui sombre.

Le médecin explique à sa femme que seul un évènement déclencheur pourrait le ramener à la vie.

C'est la cafetière qui va s'en charger, cette cafetière, qui au lieu de dysfonctionner chaque matin s'était mise à faire normalement du café, de façon irrationnelle, alors qu'il n'avait nullement cherché à la réparer, cet engin anodin va de nouveau s'emballer. Ce retour à une vie passée, celle qu'il voulait retrouver, celle qui correspond à ce rôle de "perdant", va le sortir de sa torpeur et le ramener à la vie...Mais quelle vie ?...Celle d'un homme qui n'a pas su saisir ce que la vie réelle lui proposait, celle d'un homme qui préfère rester enfermé dans ses conditionnements, sa "raison", son histoire...Il préfère être ce qu'il a toujours été que d'accepter cette irrationnalité, ces phénomènes inexpliqués, qui n'ont aucune "logique" pour lui...



https://www.youtube.com/watch?v=Z5rs6jZ7-vQ



"Mais qu'est-ce que vous avez tous avec votre amour?"



Tout le problème est là. Cet homme ne peut pas être aimé, pas de façon aussi universelle, la vie ne peut pas être aussi belle, pas avec son histoire..."Se libérer du connu." Voilà ce qui aurait pu le sauver.

Et c'est là que ce film passe, à mes yeux, de la comédie, ou satire sociale à une vision désespérante de l'humain.



Cet enfermement "rationnel" est avant tout éducatif et social. L'identification de cet homme à son histoire, une histoire qu'il a lui-même fabriquée par une attitude constamment négative, va l'emporter sur le changement "irrationnel" qui lui est proposé par la vie elle-même. Il ne s'agit pas de "chance", de "destin",mais de l'opportunité d'appréhender la vie d'une autre façon. Mais la peur va être la plus forte, la peur de ne plus exister dans un rôle, la peur de ce changement considérable d'existence. Celui qui ne change pas est avant tout un être qui a peur, ça n'est pas une question d'incapacité mais d'interdiction. C'est en cela que le conditionnement est une enceinte, un carcan, une geôle adorée. Se plaindre de cet enfermement est plus rassurant que d'en sortir...C'est effrayant...



J'ai longtemps eu peur, après la rémission inexpliquée de mes trois dernières hernies discales, que le mal me retombe dessus. Ca n'était pas rationnel, les médecins n'y comprenaient rien, moi non plus. Je savais bien que j'avais vécu une situation incompréhensible, que j'avais basculé à un moment dans une dimension inconnue mais cette absence d'explication était une torture. J'avais peur. Ca ne pouvait pas durer cette rémission, ça allait me retomber dessus sans prévenir, revenir aussi brutalement que ça avait disparu. Ce bonheur n'était pas pour moi...L'identification...Je devais me libérer du connu, de ce passé morbide, de cette détresse à laquelle je m'étais attaché parce qu'elle m'offrait un rôle en "or"...La victime, le malheureux, le supplicié...C'est là que j'ai compris que je devais écrire " Les Eveillés", aller chercher au plus profond de mes traumatismes les plus anciens la source de cette inaptitude à être heureux...Comprendre aussi que le seul instant réel, c'est celui dans lequel j'existe, que je n'avais aucune réalité dans ce passé assassin, que je n'étais rien dans cet avenir incertain, mais que le fait de me lever librement de ma chaise, sans tituber, sans canne, de pouvoir marcher, puis courir, puis skier était la seule réalité, la seule vie réelle.

J'ai enfin appris à vivre. Ca m'aura pris quarante-deux ans. Six ans que je vis pleinement, librement. Libre de moi-même, de l'autre, celui qui est mort lorsque je suis né.


Le 14/08/2010 à 20:08





J'en reviens à cette fameuse raison qui fait que bien souvent nous ne parvenons pas à saisir ce qui est proposé parce que cela ne correspond à rien de connu dans le domaine culturel de notre raison.

« L’irrationalisme » pose comme principe que la connaissance ne repose pas uniquement sur la raison. Cet irrationnel n’est pas simplement ce qui reste à expliquer. Il est bien davantage un aspect irréductible des phénomènes. Ceux concernés par la métaphysique notamment.



Hegel dit que « tout ce qui est réel est rationnel. » Cela voudrait dire que le refus bien réel de certains hommes de s’intéresser à l’irrationnel est rationnel…

Lancer une bombe atomique sur une population civile ne peut pas être une décision rationnelle…Empoisonner des vaches avec de la poudre de vaches mortes et vendre cette viande ne peut pas être un acte rationnel. Utiliser du sang contaminé pour faire des transfusions, vendre des produits alimentaires constitués d’organismes génétiquement modifiés, faire des essais d’explosions nucléaires, jeter dans les océans des containers de déchets radioactifs, rejeter dans l’atmosphère des poisons comme autant de bombes à retardement, voter pour Nicolas Sarkozy…, tout cela et le reste (la liste est longue) ne peut pas être rationnel.

Ou alors la raison est une abomination.



La raison de certains hommes est totalement déraisonnable si on se place du point de vue universel. Leur irrationalité a des fins mercantiles et égoïstes. C’est malheureusement réel. Et c’est leur « raison » d’être.



Tous les actes humains seraient donc générés par la raison, même si ces actes vont à l’encontre des hommes, de la planète, de la vie elle-même. On ne peut par conséquent se fier corps et âme à cette raison. Ca serait totalement déraisonnable…



Blaise Pascal avait démontré que la condition de l’homme était irrationnelle. Rien ne pouvant justifier le fait que nous existions. Leibniz se demandait « pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? »

Sartre à son tour écrivait que « tout existant naît sans raison. »



C’est complètement irrationnel tout ça ! Ah oui, bien sûr, il suffit de faire intervenir Dieu et son projet pour que la raison l’emporte. Dieu serait donc rationnel ? Hum…Finalement, la raison émet des supputations que l’irrationnel adore…Certains sont très doués dans la dialectique pour détourner la raison…

Et si tout cela n’avait aucune raison, si le phénomène de la Vie n’avait aucun objectif, aucune raison d’être, sinon juste d’être là ? C’est notre raison cartésienne et obsessionnelle qui imaginerait une justification à l’ensemble. Mais l’imagination n’est pas rationnelle. Diantre, on tourne en rond !!



Si je reprends le film dont j’ai parlé hier « Du jour au lendemain », c’est bien parce que l’absence de solution rationnelle laisse libre cours à l’imagination que le personnage principal part en vrille et se retrouve interné. L’imagination ne peut pas expliquer les phénomènes rationnellement. Seule la science peut le faire. Mais si celle-ci se retrouve désemparée, que reste-t-il à nos âmes égarées ?

La folie ou la métaphysique. Guère d’autres choix. Ah, si, bien sûr, le sommeil éveillé ! Continuer à vivre comme un pantin, conditionné, formaté, cultivé, moulé, encapsulé. Ce modèle a beaucoup de succès d’ailleurs. Très à la mode. Reproductible à l’envie, facilement transmissible.



Pour la science, dire que l’eau est chaude ou froide n’est pas une vérité. Il convient d’en mesurer précisément la température pour établir une vérité vérifiable à l’infini. Il y a bien évidemment par conséquent des vérités scientifiques. Mais qu’en est-il de la souffrance, des espoirs, des rêves, des regrets, des pensées, des émotions, des perceptions sensorielles et extra sensorielles, des intuitions, des coïncidences, des synchronicités, des visions prémonitoires, des rémissions, des guérisons médicalement inexplicables, des miracles ? N’y a-t-il pas également des « vérités » invérifiables, injustifiables, incompréhensibles mais pourtant répétées un nombre de fois incalculable par des millions d’individus dans une réalité visible, palpable, connue, à défaut d’être reconnue? Est-ce parce que tout cela n’est pas reproductible scientifiquement qu’il n’est pas possible d’y voir un phénomène autrement caractérisé par l’irrationalité ? Je peux me permettre d’en parler, j’ai déjà dit pour quelles raisons.

On se souviendra qu’Alfred Wegener en son temps était rabroué pour sa théorie de la tectonique des plaques. Il est mort au Groenland en tentant de prouver qu’il avait raison et que la raison scientifique de l’époque n’était tout simplement pas assez évoluée pour accéder à un système aussi étourdissant à l’échelle humaine.



Cette raison ne devrait-elle pas garder raison en s’interdisant d’interdire ?



Qui peut dire aujourd’hui ce que sera le niveau de connaissances dans mille ans ? Peut-être les hommes de ce temps à venir éclateront de rire en étudiant l’ignorance dans laquelle nous évoluons sur un plan spirituel, métaphysique, philosophique…Il serait raisonnable d’y songer.



Ce que je n’aime pas finalement c’est l’oppression scientifique, cartésienne. Cette idée selon laquelle, tout ce qui n’est pas de l’ordre du rationalisme n’est pas réel est une hérésie aussi destructrice que d’affirmer outrancièrement que Dieu existe. On entre dans l’hermétisme, le fanatisme, le prosélytisme, le terrorisme spirituel. Pour Descartes et Platon avant lui, il s’agissait de fonder la connaissance sur autre chose que le mythe ou la religion. Si ce rationalisme devient à son tour une entrave, un cadre infranchissable, on ne s’en sort plus…



Et d’ailleurs, aucun scientifique ne parviendra à me convaincre que je ne suis pas réel alors que je marche irrationnellement. Alors, quoi, je suis un monstre, une erreur, un plantage de la matrice ? On pourrait monter un sacré grand club tellement nous sommes nombreux. Tiens, en voilà, une idée qu’elle est bonne…


Est-ce que quelqu'un oserait dire que sa réponse est irrationnelle?



https://www.dailymotion.com/video/x9axew_regard-d-espoir-contre-le-cancer_news



Est-ce que l'amour est irrationnel ?
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marie-josé
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeDim 15 Aoû - 13:19

wouwww Thierry, ton texte me laisse sans voix....(Nelly dirait,c'est pas possible)
mais oui!
car oui l'amour est irrationnel,l'amour humain,l'amour divin,l'amour de la nature ,l'amour des animaux, l'amour pour soi,l'amour pour les autres???????
Tous cela EST IRRATIONNEL.

CE dont nous sommes capable par amour, ...déplacer des montagnes, j'y crois fortement!
Le cerveau a des pouvoirs encore inconnus! certains dirons "charlatanisme"...........d'autres dirons puissance d'esprit!

en tous cas, ça ne peut laisser indifférent
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Nelly
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeDim 15 Aoû - 13:32

marie-josé a écrit:
wouwww Thierry, ton texte me laisse sans voix....(Nelly dirait,c'est pas possible)
mais oui!
Je confirme. Wink

marie-josé a écrit:
car oui l'amour est irrationnel,l'amour humain,l'amour divin,l'amour de la nature ,l'amour des animaux, l'amour pour soi,l'amour pour les autres???????
Tous cela EST IRRATIONNEL.
L'amour, pour qui que ce soit, est un sentiment et donc, par définition, irrationnel.

marie-josé a écrit:
CE dont nous sommes capable par amour, ...déplacer des montagnes, j'y crois fortement!
Le cerveau a des pouvoirs encore inconnus! certains dirons "charlatanisme"...........d'autres dirons puissance d'esprit!
Il existe des charlatans. Beaucoup. Souvent. Ce n'est pas pour autant qu'il faut faire un trait sur l'irrationnel. Et pourquoi l'irrationnel ne pourrait-il pas être rationnel et le rationnel irrationnel ? Nous sommes tellement petits, le savoir des "grands"' tellement infime, que beaucoup de possibilités restent ouvertes.

Dans certaines situations, le côté rationnel s'impose. Certains prétendent pouvoir guérir un cancer par l'imposition des mains. Grand bien leur fasse, et pourquoi pas, mais en complément. Je ne reconnais à personne e droit de proposer d'arrêter les médicaments allopathiques avant d'avoir des résultats concrets. Il ne faut pas se laisser aveugler par l'irrationnel tout en laissant certaines portes ouvertes. Tout dépend du domaine dans lequel on se trouve.

marie-josé a écrit:
en tous cas, ça ne peut laisser indifférent
N'oublie pas que beaucoup de personnes ne croient que ce qu'ils peuvent prouver. C'est leur droit.
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeDim 15 Aoû - 16:47

Un petit coucou rapide, on reprend la route pour une semaine dans la Drôme, escalade, vtt et rando aquatique
Bises
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeDim 15 Aoû - 16:50

Thierry a écrit:
Un petit coucou rapide, on reprend la route pour une semaine dans la Drôme, escalade, vtt et rando aquatique
Bises

n'en fais pas trop tout de même Rolling Eyes attention a la fatigue?
Tu m'a l'air de toujours bouger Wink
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeLun 16 Aoû - 7:05

C'est beau quand même d'avoir de

grands sportifs sur ce forum!
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeLun 16 Aoû - 7:58

marie-josé a écrit:
Thierry a écrit:
Un petit coucou rapide, on reprend la route pour une semaine dans la Drôme, escalade, vtt et rando aquatique
Bises
n'en fais pas trop tout de même Rolling Eyes attention a la fatigue?
Tu m'a l'air de toujours bouger Wink
Oui, Thierry semble beaucoup bouger, mais il se fait plaisir et "quand on aime on ne compte pas". On est souvent fatigué par le stress plus que par la dépense physique. Thierry a la chance d'aimer le sport et les grandes émotions. Bonnes vacances et raconte-nous, à ton retour.
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeVen 20 Aoû - 12:11

Hello ! Nous voilà rentrés, deux virées en VTT, une rando aquatique, une via ferrate, un gros sommet, des paysages magnifiques et une méga caisse physique ^^
On va se faire deux, trois jours de jardinage, c'est la jungle ici et on repart.
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Brumes
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Brumes



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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeVen 20 Aoû - 16:14

Brumes a écrit:
C'est beau quand même d'avoir de

grands sportifs sur ce forum!

JE PERSISTE ET SIGNE

Comme j'aime voir nos athlètes du forum !!!

J'aime tellement le sport. Tous les sports.

Ben quoi, faut bien des supporters... Si tout le monde st en piste, qui va vous admirer ?????????

Victoire Victoire OK

drunken drunken ça c'est pour moi.
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeVen 20 Aoû - 16:33

Brumes a écrit:
Brumes a écrit:
C'est beau quand même d'avoir de

grands sportifs sur ce forum!

JE PERSISTE ET SIGNE

Comme j'aime voir nos athlètes du forum !!!

J'aime tellement le sport. Tous les sports.

Ben quoi, faut bien des supporters... Si tout le monde st en piste, qui va vous admirer ?????????

Victoire Victoire OK

drunken drunken ça c'est pour moi.

C'est pour ça Brumes que je mets des photos ! Comme en plus c'est dans la nature, c'est le must Smile
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeVen 20 Aoû - 16:40

Thierry a écrit:
Hello ! Nous voilà rentrés, deux virées en VTT, une rando aquatique, une via ferrate, un gros sommet, des paysages magnifiques et une méga caisse physique ^^
On va se faire deux, trois jours de jardinage, c'est la jungle ici et on repart.
moi qui n'ai pas la moindre fibre sportive, je t'admire,surtout sachant d'où tu viens?
c'est incroyable,mais je comprend cela,car j'ai un mari qui à ses septante ans roule encore en vélo de course,et fait ses 70km en 2.20minutes.
c'est parfois angoissant quand de le voir passer.

Je suis persuadée que si je pouvais faire du sport,mon diabète disparaîtrait. Smile
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeVen 20 Aoû - 16:47

marie-josé a écrit:
moi qui n'ai pas la moindre fibre sportive, je t'admire,surtout sachant d'où tu viens?
c'est incroyable,mais je comprend cela,car j'ai un mari qui à ses septante ans roule encore en vélo de course,et fait ses 70km en 2.20minutes.
c'est parfois angoissant quand de le voir passer.
Et quand le vois-tu passer ? Quand tu sirotes ta bière sur une terrasse ? Cool Question

marie-josé a écrit:
Je suis persuadée que si je pouvais faire du sport,mon diabète disparaîtrait. Smile
Tu l'as mesuré ce matin ? Wink siffleur
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeVen 20 Aoû - 17:00

Nelly a écrit:
marie-josé a écrit:
moi qui n'ai pas la moindre fibre sportive, je t'admire,surtout sachant d'où tu viens?
c'est incroyable,mais je comprend cela,car j'ai un mari qui à ses septante ans roule encore en vélo de course,et fait ses 70km en 2.20minutes.
c'est parfois angoissant quand de le voir passer.
Et quand le vois-tu passer ? Quand tu sirotes ta bière sur une terrasse ? Cool Question
v'la quel me fait passer pour une poivrote ?.....non madame ,quand je suis sur le terrain de pétanque!....NA!!!!

marie-josé a écrit:
Je suis persuadée que si je pouvais faire du sport,mon diabète disparaîtrait. Smile
Nelly a écrit:
Tu l'as mesuré ce matin ? Wink siffleur
oui madâaame, il est couci-couça????? affraid
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeDim 22 Aoû - 8:39

Thierry, je reviens à ton 1er message sur la rationalité... que j'ai lu en plusieurs fois.
je ne puis malheureusement pas répondre longuement.

Il y a trop de points à détailler study

Quelques fois, on extrait un évènement qui ne reflète pas "la réalité". Ce n'est pas la même époque, on ne connaît pas toutes les données, il y a des circonstances qui obligent à agir d'une certaine façon alors qu'on aurait préféré le contraire etc.

Dès qu'on dépasse le cadre de sa propre personne est-on sûr d'être dans le vrai ?

Même les proches voient les choses autrement dans un évènement commun...Alors quand le cercle s'élargit, jusqu'à une échelle mondiale parfois... avec des optiques, des mœurs différentes il est bien difficile de parler de rationalité.

Je regrette de ne pouvoir développer davantage mais je dois m'arrêter...
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stip
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeDim 22 Aoû - 9:42

Il y a une dimension moralisatrice dans ton analyse, je n'ai pas vu cette fiction pourtant je peux t'assurer que je connais des gens uniquement rationnels, des esprits forts éclairés qui s'en portent très bien tout en conservant une dimension éthique plus qu'honorable.Je pense par exemple à un Georges Charpak.....
Moi, ça me rassure de savoir qu'il y en a, même si j'avoue avoir parfois un côté fantasque qui trouve qu'un peu d'irrationalité met du sel à mon imaginaire.
Ne serait-ce qu'à travers nos rêves.
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeDim 22 Aoû - 12:25

Le rêve faisant partie de moi, je navigue entre les deux, très à l'aise...

Suivant les circonstances...

Difficile après ça de trancher !

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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeDim 22 Aoû - 13:13

stip a écrit:
Il y a une dimension moralisatrice dans ton analyse, je n'ai pas vu cette fiction pourtant je peux t'assurer que je connais des gens uniquement rationnels, des esprits forts éclairés qui s'en portent très bien tout en conservant une dimension éthique plus qu'honorable.Je pense par exemple à un Georges Charpak.....
Moi, ça me rassure de savoir qu'il y en a, même si j'avoue avoir parfois un côté fantasque qui trouve qu'un peu d'irrationalité met du sel à mon imaginaire.
Ne serait-ce qu'à travers nos rêves.

Mon problème, Stip, c'est lorsqu'un chirurgien, un médecin, un radiologue me sortent que mon cas est irrationnel et qu'il est plus que probable que ces hernies réapparaîtront un jour ou l'autre, c'est impossible qu'elles disparaissent comme ça. Leur raison ne saurait s'y soumettre. C'est leur morale qui me révolte. Je ne sais pas si j'en ai déjà parlé ici mais mon frère était cliniquement mort après un accident de voiture. Il avait 19 ans. Ils attendaient qu'il meurt pour de bon. Il est sorti de l'hôpital trois mois après. C'était irrationnel, totalement anti scientifique. Je précise qu'il n'avait plus de partie frontale à la boîte cranienne. Juste un trou béant. Il n'est pas mort et cette vérité irrationnelle leur était insupportable. Tout comme le fait que je marche. Ce scientisme est une horreur. Georges Charpak en fait d'ailleurs partie. Il lui était facile de s'attaquer comme il l'a fait dans son livre "devenez sorcier, devenez savant", la démarche est louable mais l'amalgam est redoutable. Je m'intéresse bien davantage à des gens comme Rupert Sheldrake ou Jean Marie Pelt...Il y a des scientifiques que je respecte infiniment parce qu'ils ont dans leur démarche une infinie humilité.
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeDim 22 Aoû - 16:14

Thierry a écrit:
Mon problème, Stip, c'est lorsqu'un chirurgien, un médecin, un radiologue me sortent que mon cas est irrationnel et qu'il est plus que probable que ces hernies réapparaîtront un jour ou l'autre, c'est impossible qu'elles disparaissent comme ça. Leur raison ne saurait s'y soumettre. C'est leur morale qui me révolte.
Mais tu n'es pas d'accord avec le fait que ton cas semble effectivement irrationnel ? Il n'est pas explicable pour eux et se heurte à toutes leurs études, toutes leurs convictions ! Ce qui est insupportable est le fait qu'ils te disent qu'il est probable que ces hernies réaparaissent. Même s'ils le pensent au fin fond de leur tête, il n'était pas utile qu'ils te fassent peur.

Thierry a écrit:
Je ne sais pas si j'en ai déjà parlé ici mais mon frère était cliniquement mort après un accident de voiture. Il avait 19 ans. Ils attendaient qu'il meurt pour de bon. Il est sorti de l'hôpital trois mois après. C'était irrationnel, totalement anti scientifique. Je précise qu'il n'avait plus de partie frontale à la boîte cranienne. Juste un trou béant. Il n'est pas mort et cette vérité irrationnelle leur était insupportable.
Avoue que tu nous cites des situations totalement invraisemblables ! Ton frère a également était confrontée à... Hélène, je crois ?
La situation que tu évoques-là soulève une autre question : comment pourront réagir tous ces médecins, perplexes devant une telle situation, devant un cas similaire, un patient cliniquement mort, dont la famille demande l'euthanasie. Je sais qu'elle n'est pas autorisée en France, mais il y a ce qu'on dit et ce qu'on fait. Comment réagir ?

Thierry a écrit:
Je m'intéresse bien davantage à des gens comme Rupert Sheldrake ou Jean Marie Pelt...Il y a des scientifiques que je respecte infiniment parce qu'ils ont dans leur démarche une infinie humilité.
Tous les scientifiques doivent faire preuve d'une certaine humilité, mais je peux comprendre qu'ils aient du mal à admettre ce qu'ils voient et que personne ne sait expliquer !
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeDim 22 Aoû - 17:51

Non Nelly, mon cas n'est pas irrationnel. Il l'est seulement pour certains médecins et leur culture médicale. Mon ancien médecin de famille a parlé de chance". Celui que j'ai aujourd'hui parle de l'incapacité de la science d'expliquer ces phénomènes parce qu'elle ne comprend pas tout du fonctionnement de l'esprit et de son osmose avec notre corps. Et il rajoute que c'est un cas passionnant comme il en existe des milliers d'autres et que la science devrait saisir cette chance de progresser au lieu de les nier.

Pour ce qui est de Christian mon frère, c'était en 1972, j'avais 16 ans, je ne connaissais évidemment pas Hélène. Le toit de la voiture avait défoncé sa boîte cranienne. Fracture ouverte du fémur, de la cheville, fractures de deux vertèbres, une septicémie, trois opérations au cerveau, il a été le premier en France à porter une prothèse frontale.

Mes parents et moi avons refusé de sortir de la chambre. Nous l'avons veillé et soutenu pendant trois mois, jusqu'à ce qu'il sorte et je me suis occupé de lui pendant deux ans, pour sa rééducation physique, jusqu'à ce qu'il puisse reprendre l'escalade, avec une cheville bloquée.

Christian est mort d'une rupture d'anévrisme à 39 ans, vingt ans après son accident.

J'ai écrit "Les Eveillés" pour comprendre.

Pour ce qui est d'Hélène, ma mère est venue de Bretagne la voir pendant une semaine, tous les jours. Dégénérescence maculaire. Une catastrophe évidemment. C'était en novembre 2009. Plus d'évolution aujourd'hui et elle a même récupéré une partie de sa myopie. Elle a été obligée d'alléger la correction de ses verres. C'est irrationnel pour la science, pour son ophtalmo qui "n'a jamais vu ça." Ma mère ne lui a pas parlé d'Hélène, elle n'a pas osé, une certaine gêne en fait. Alors que c'est elle qui m'envoyait voir une mémé guérisseuse quand j'étais petit, j'avais des verrues aux mains, elle les faisait partir en récitant des formules magiques, c'est comme ça que je voyais son baragouinage auquel je ne comprenais rien. Une semaine après, je n'avais plus rien. C'est irrationnel pour la science. Pas pour cette mémé.
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeDim 22 Aoû - 18:01

"Les Eveillés".



Il marche. Les paysages sont en lui. L’impression de devoir reconstituer un puzzle épars dont il ne connaît même pas l’image initiale.

« Yoann, Yoann, réveille-toi. Christian a eu un accident de voiture. Il faut qu’on parte à l’hôpital. »
C’était rare que sa mère vienne le réveiller. Ça l’avait surpris. Elle avait allumé la lampe de chevet. Il avait vu dans ses yeux une peur effroyable. Il s’était habillé. Les gestes maladroits et les pensées affolées. Sa mère était descendue. Son père sortait la voiture.

Il ne se souvient pas du trajet. Silencieux sans doute, chacun enfermé dans l’angoisse de l’inconnu. Le silence de la peur. Christian. Son grand frère. Qu’avait-il exactement ? Il n’avait rien osé demander. Son père roulait vite. Effroyable tension dans la voiture.

Ils étaient passés à Quimper. Aux urgences, on leur avait dit que l’ambulance était immédiatement repartie vers l’hôpital de Brest.
« Ici, on ne peut rien faire, c’est trop grave. »

Son père avait essayé de rattraper l’ambulance. Voix express Quimper - Brest.
Il regardait les voitures qui les croisaient, les ombres lointaines des arbres, les collines adossées à la nuit, les champs sombres sans frontières. Il se disait que ces kilomètres qui défilaient dans le ronronnement forcené du moteur les éloignaient à tout jamais de leur vie passée, qu’un mur gigantesque venait de se dresser entre ce temps à vivre et leur histoire commune. Il avait seize ans. Christian dix-neuf. Il pressentait le pire. Sans trop savoir pourquoi, un court instant, il avait espéré qu’il ne se trompait pas. Il avait eu honte, terriblement honte et cette pensée insoumise l’avait révolté.

Ils avaient eu du mal à trouver les urgences. Un interne avait dit qu’il était dans une chambre.
Pourquoi dans une chambre ? Pourquoi ne le soignait-on pas ?
Ils ne comprenaient pas. Ils avaient cherché dans les couloirs. La peur au ventre. Chambre 18. Etrange, c’était son jour de naissance. Il s’était dit que Christian ne pouvait pas y mourir.
Le couloir. Odeur écoeurante. Plafonniers à néons, des coulées de lumière pâle qui suintent sur les murs aux peintures délavées. Il suit ses parents.
Un homme, blouse blanche, il est debout devant la porte.

« Bonjour. Vous êtes les parents ?
- Oui. Notre fils est là ? Qu’est-ce qu’il a ?
- Il est cliniquement mort. Je suis désolé. »

Sa mère qui s’affaisse, son père qui la retient, il pousse la porte, il entre, une infirmière range des instruments sur un chariot roulant, son frère est là, allongé.
Son frère.
Il le reconnaît à peine. Ce n’est plus un visage mais une plaie violette, boursouflée, éclatée. Il a un haut-le-cœur. Un râle alarmant s’extirpe péniblement de la poitrine. Comme des bulles de sang qui crépitent. Il s’approche prudemment. Un bruit au fond de la chambre, il se tourne. L’infirmière entreprend de déplacer une table basse, elle la traîne sur le carrelage, un crissement suraigu, son frère se redresse en hurlant, à angle droit dans le lit, terrifiante vision, le râle s’étouffe dans la gorge, il fixe le mur blanc de ses yeux tuméfiés puis il s’écroule sur le lit qui tremble sous le choc.
Il s’approche de l’infirmière, il a envie de la frapper, il soutient son regard, il la prend par les épaules et la conduit fermement à la porte, elle ne résiste pas, ses parents entrent, l’infirmière se réfugie vers l’interne impassible, sa mère se tourne vers le lit, elle pousse un cri qu’elle étouffe sous sa main, son père murmure, une voix brisée qu’il ne reconnaît pas,
« Mon Dieu, Christian, mon petit. »

Mon Dieu …
Cette haine qui l’a envahi en entendant ce nom. S’il avait su comment s’y prendre, il aurait pu tuer ce Dieu, à cet instant là, que l’humanité entière disparaisse avec lui, il n’en avait rien à faire, juste cette haine dont il fallait user, cette violence incommensurable qui l’étourdissait, il aurait pu tuer n’importe qui, il le sait, il n’a jamais oublié ce désir de mort à donner … Il le submerge encore parfois. Avec une violence qui lui fait peur.
Et pourtant ce sermon immédiatement prononcé, à voix haute, sans que rien ne l’annonce, comme si sa voix lui échappait, comme si l’idée en lui débordait et qu’il n’avait aucun contrôle.
« Je sortirai de cette chambre avec Christian et il sera vivant. »
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeLun 23 Aoû - 10:26

mon dieu Thierry!....comme tu écris bien, mais hélas, je sais que ceci n'est pas de la fiction.
Quel calvaire pour tes parents, ces deux fils ,dans le malheur et qui en ressortent avec le courage et de la persévérance!
Qu'en est-il aujourd'hui de ton frère,si ce n'est pas indiscret!
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeLun 23 Aoû - 10:39

marie-josé a écrit:
mon dieu Thierry!....comme tu écris bien, mais hélas, je sais que ceci n'est pas de la fiction.
Quel calvaire pour tes parents, ces deux fils ,dans le malheur et qui en ressortent avec le courage et de la persévérance!
Qu'en est-il aujourd'hui de ton frère,si ce n'est pas indiscret!

Christian est mort d'une rupture d'anévrisme à 39 ans. Un gendarme de Quimper m'a téléphoné dans la nuit, il n'arrivait pas à joindre mes parents, il avait eu mon tél par l'ancienne compagne de mon frère. Je ne savais pas où étaient mes parents, ils avaient l'habitude de partir en camping car sans donner de destination précise et ils n'allumaient jamais leur tél portable. J'ai pris l'avion et je me suis occupé de mon frère en essayant tous les jours de joindre mes parents. C'est en faisant un transfert d'appel du fixe de Christian vers le tél de la maison de mes parents que j'ai fini par les contacter.
"Maman, je suis à la maison, à Fouesnant, Maman, Christian est mort."
C'est une phrase épouvantable.
Il fallait que j'écrive tout ça, comme pour poser un fardeau qui m'écrasait, jusqu'à briser ma colonne vertébrale...
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeLun 23 Aoû - 10:49

Ce doit être une tâche bien difficile,que d'annoncer ce genre de chose a ses parents!

en plus du chagrin que l'on a, on sais que nous allons encore en plus briser les parents .

ils ont eut pas mal a supportés ces gens.
et toi m^me ,tu en est ressorti meurtri!
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeLun 23 Aoû - 12:07

marie-josé a écrit:
ils ont eut pas mal a supportés ces gens.
et toi m^me ,tu en est ressorti meurtri!
Il s'agit d'un cauchemar infini, particulièrement pour les parents, mais également pour les autres proches.

Par contre, je ne sens pas Thierry meurtri par ses propres problèmes de santé. Je le trouverais plutôt renforcé, peut-être même pas endurci par la difficulté. Corrige-moi si je me trompe, Thierry. On dirait que tes randonnées, ta mise à l'épreuve physique extrême t'aident à surmonter ces passages. En te surpassant, tu sembles te prouver à toi-même ce que tu as réussi à faire, repoussant toujours tes limites. Tu laisses tes enfants partir à l'autre bout du monde sans leur opposer le problème de l'anxiété que tu serais en droit de ressentir pour avoir un vécu aussi fort.
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeLun 23 Aoû - 13:12

Nelly a écrit:
marie-josé a écrit:
ils ont eut pas mal a supportés ces gens.
et toi m^me ,tu en est ressorti meurtri!
Il s'agit d'un cauchemar infini, particulièrement pour les parents, mais également pour les autres proches.

Par contre, je ne sens pas Thierry meurtri par ses propres problèmes de santé. Je le trouverais plutôt renforcé, peut-être même pas endurci par la difficulté. Corrige-moi si je me trompe, Thierry. On dirait que tes randonnées, ta mise à l'épreuve physique extrême t'aident à surmonter ces passages. En te surpassant, tu sembles te prouver à toi-même ce que tu as réussi à faire, repoussant toujours tes limites. Tu laisses tes enfants partir à l'autre bout du monde sans leur opposer le problème de l'anxiété que tu serais en droit de ressentir pour avoir un vécu aussi fort.
je parlais de cette sorte de culpabilité qu'il a dut ressentir en devant annoncer ça à ses parents!
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeLun 23 Aoû - 13:26

Comme le dit Nelly, de telles épreuves anéantissent ou forgent au contraire un caractère, un dépassement de soi.

L'expression " la rage de vaincre" prend ici tout son sens.

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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeLun 23 Aoû - 13:46

Vaut mieux ça comme réponse.
La culpabilité n'était pas dans l'annonce à mes parents...

Les Eveillés.

Il décroche fébrilement le combiné.
« Allo, je suis bien chez Monsieur Yoann Dennez ?
- Oui, c’est moi. »
Le cœur battant. Vingt-trois heures quinze. La sonnerie du téléphone l’avait brutalement sorti du sommeil. Nu, accoudé au buffet. Les idées claires. Lucidité de la peur. Leslie à ses côtés.
Il savait. A cette heure là, ça ne pouvait être qu’une mauvaise nouvelle. Intuition.
La voix inconnue s’était présentée. Un brigadier. Gendarmerie de Quimper.
Les pensées qui s’affolent, les interrogations qui fusent.

« Vous êtes bien le frère de Christian Dennez ?
- Oui. »
Peut-être juste un accident. Mais pourquoi l’appelait-on ?
Le défilement des pensées, cette vitesse hallucinante, toutes les options en quelques secondes.
« Je suis désolé Monsieur de devoir vous annoncer ça mais votre frère est décédé. »

Une chaise. Les jambes qui ploient, le ventre déchiré, un coup de poignard. S’asseoir avant de tomber.
« Le médecin qui l’a ausculté pense à une rupture d’anévrisme. Nous avons essayé de contacter vos parents mais ils ne sont apparemment pas à leur domicile. C’est la compagne de votre frère qui nous a donné votre numéro de téléphone. Je vous passe cette personne.
- Allo, Yoann, c’est Florence. Je suis désolée Yoann. Je ne savais pas quoi faire. J’ai pensé qu’il fallait te prévenir. Christian devait venir chercher Florian pour le week-end. Comme il n’est pas passé à l’appartement, je suis allé chez lui et il ne répondait pas. Ni au téléphone. Je me suis inquiétée et j’ai fini par aller à la gendarmerie. Ils ont ouvert la porte et ils ont trouvé Christian. »
Où sont ses parents ? Le camping-car. Ils doivent être en voyage.
Le cerveau en ébullition. Des ruissellements de frissons. La nausée. La Mort qui court dans ses fibres.
« On a essayé d’appeler tes parents sur leur portable mais on tombe toujours sur la messagerie. Tu ne sais pas où ils sont ? »
Il ne savait pas.

Christian. Mort.
La Faucheuse avait fini par l’avoir.
Salope.
Rupture d’anévrisme. Tellement facile pour elle. Elle ne lui avait laissé aucune chance. Une revanche implacable. Il avait osé lui tenir tête. Il avait voulu l’humilier. Fini de jouer. Il suffisait d’une petite implosion. Imparable.
Salope.

La voix du brigadier. Compatissante, posée. Il ne sait plus ce qu’il a dit. Venir en Bretagne, réussir à joindre ses parents, s’occuper du corps, contacter la morgue.
« Je prendrai un avion demain matin. »
Un rendez-vous à l’aéroport avec Florence.
Il raccroche.
Préparer un sac, quelques affaires. Leslie qui cherche un horaire sur internet. Efficace, comme toujours. Elle l’a serré dans ses bras. Cette tristesse dans ses yeux. Encore une fois pour lui le soutien indispensable, encore une fois pour elle la douleur de l’impuissance, ce sentiment affreux de ne pouvoir rien faire, ou trop peu, de ne pas trouver les mots, de n’être qu’un témoin démuni.
Tout ce qu’il lui a fait vivre …

Christian. Mort.
Deux ans qu’ils ne s’étaient pas vus. Juste un repas ensemble. En famille. Il ne vivait déjà plus avec Florence. Florian avait six ans. Une première séparation avec le divorce des parents. Une perte définitive désormais. Un petit garçon sans son père. Pourquoi tout ça ? Question absurde. Il regardait les nuages par le hublot. C’était la première fois qu’il prenait l’avion. L’année de ses trente-six ans. Christian allait avoir quarante ans. Dans quelques jours.
Pourquoi tout ça ?
Depuis si longtemps. Tout ce chemin, cette résistance acharnée, cette vie reconstruite, un enfant, une formation professionnelle, tout rebâtir, des années de lutte obstinée, ne jamais abandonner, rester debout, aucune plainte, aucune jérémiade, lutter, lutter, humilier la mort. Vivre. Debout.

« Mesdames, messieurs, nous allons traverser une zone de turbulences. Nous vous demandons de bien vouloir attacher vos ceintures. »

Et dans la solitude de la nuit, l’abandon au sommeil, le relâchement des surveillances, la Mort qui se glisse, s’insinue dans une veine, elle cherche un point faible, silencieuse, indétectable, même pas une migraine, pas un vertige, pas un cauchemar, aucun signe précurseur, elle fouille, parcourt les labyrinthes au fil du sang, là, une usure, un vaisseau fissuré, une épaisseur érodée, une faiblesse ancienne, elle s’accroche, un sourire aux lèvres, elle s’installe, se niche dans les tissus, teste les fibres, un frisson de plaisir devant l’échéance, le point de rupture, une faille dans la muraille, elle écoute ce battement cardiaque qui l’indispose, ce tempo irritant, elle n’aime que le silence des cadavres, la puanteur des charniers, elle se gonfle de haine, les tissus résistent, elle s’amuse de ce refus qu’elle perçoit, la vie n’abandonne pas, le courant sanguin accélère, le cœur s’emballe, une alerte a retenti, la vie cherche à l’expulser, des cascades vivaces la bousculent, des flots de sang comme des videurs.
Pas de temps à perdre. Fin du jeu.

Une lame qui tranche la veine.
Sursaut.
Le sang qui se déverse.
Le cerveau qui se vide.
Un sursaut de conscience. La terreur.
Spasmes.
Le cœur qui s’arrête.
Fin des connections.

Salope.

Il pleure, le front posé contre le hublot.
L’aile tranche des nuages cotonneux. Soubresauts.

Cette distance qui s’était installée. Christian aussi l’avait peut-être désirée. Comment supportait-il la comparaison avec ce frère marié, père de trois enfants, instituteur, sportif, voyageur, écrivain ? Tant de douleurs à recevoir à chaque rencontre. L’éloignement le protégeait au moins des colères ravalées. Cette injustice qui le rongeait. C’était tellement visible. Il n’avait jamais accepté cette cassure dans son existence, ce calvaire, ce drame inconcevable. L’accident lui avait volé sa vie. Impossible d’apprécier ce qui lui restait. Pas suffisamment en tout cas. Son enfant lui avait permis de vivre les jours avec davantage de douceur. Enfin.
Et tout s’était arrêté.
Cette désillusion de ne pas parvenir à vivre correctement, à être durablement installé dans une voie professionnelle, cette lutte permanente, comment la vivait-il vis-à-vis de Florian ? Une honte ou un défi ? S’y était-il épuisé au point qu’une veine éclate, son esprit endurait-il un tourment si puissant que la pression s’était révélée insupportable, cette dépendance envers les parents, l’incertitude qu’il représentait, l’inquiétude, l’angoisse, le poids qu’il rajoutait alors qu’ils approchaient de la retraite et pouvaient espérer en apprécier les bienfaits, cette quasi solitude dans laquelle il vivait, il lui restait combien d’amis véritables ?
Cette vie n’avait-elle été qu’un calvaire ? Un chemin de croix ?
Christian … Christ …
Il n’y avait jamais pensé. Le parallèle ne l’avait jamais frappé.
Un chemin de croix.
Pour qui ?
Il avait porté sa vie comme un fardeau.


Aéroport de Lorient. Florence. Quelques échanges.
Il n’a pas envie de parler.
Une infinie tristesse. Une boule d’angoisse qui gonfle, un nœud qui l’étrangle. Les pensées qui se projettent. La morgue.

La mairie de Quimper. Il est devant l’accueil.
C’est la première fois qu’il doit prononcer cette phrase immonde.
« Mon frère est mort. »
Il n’a pas envie de parler.
On le renseigne. Bureau de l’état-civil. Une femme. Un regard très doux. Il se sent tout petit, un enfant, totalement démuni.
« Je n’arrive pas à joindre mes parents. Ils ne savent pas. »
Elle explique. Les démarches. Il l’écoute. Il signe des papiers.
Tout ce qu’il doit faire encore.

Pompes funèbres. Il est devant le bâtiment. Sombre comme un caveau.
Pousser la porte. Toutes ces images qu’il devine.
Il a encore essayé de joindre les parents sur le portable. Messagerie. Pas le choix. Il le fera tout seul. Il a la gorge sèche.
Un homme l’accueille. Grand, sec, les cheveux gominés, une raie taillée au cordeau. Costume gris. Voix contenue. Quelques échanges.
Il n’a pas envie de parler.
Il voudrait que tout se fasse en silence, sans un mot, qu’on le laisse entrer dans sa bulle, qu’il ne soit même plus visible, qu’on ne puisse plus le contacter.
S’occuper de Christian. Il en est capable, il pourrait même le prendre sur son dos et le ramener à la maison, l’allonger dans sa chambre, rester à ses côtés, lui parler, lui lire un livre. Comme à l’hôpital. Et attendre. L’accompagner encore.
Mais il n’a pas envie de parler.
Il n’a pas envie des hommes. Leur compassion ne lui sert à rien. Elle n’apaise pas les douleurs qui le tenaillent.
Assis dans un bureau. Signer des papiers.

« Je n’arrive pas à joindre mes parents. Ils ne savent pas. »
Rien d’autre à dire.
Il se sent tout petit. Comme un enfant. Totalement démuni.
L’homme lui parle mais il ne l’entend pas vraiment. Ou plutôt, une partie de son cerveau enregistre les paroles mais l’essentiel de ses pensées n’est pas là. L’homme a croisé les mains sur le bureau. Il a les doigts fins, osseux, gris comme son costume, des ongles rognés, des phalanges bosselées.

L’allure des cadavres qu’ils charrient.

Son esprit s’échappe.
Il réalise soudainement qu’il se sent misérable parce qu’il n’y a plus rien à faire. C’est trop tard. La lutte est finie, le défi n’a plus cours. La Mort a gagné. Il ne reste que la détresse. L’impuissance. Il est arrivé trop tard. Christian l’a peut-être attendu, il a peut-être espéré qu’il viendrait, il désirait peut-être de l’aide, un soutien, un peu d’apaisement, des rires, l’insouciance, une journée d’escalade, la beauté du monde, retrouver les souvenirs, les ranimer, parler ensemble, se dévoiler un peu, les douleurs, les espoirs, les projets. Cette dernière soirée devant le téléphone, un numéro sur les genoux, ne pas réussir à appeler, comme englué déjà dans les effluves mortuaires. Cette détresse comme le couperet de la vie maintenue.
Le silence, les non-dits, la pudeur, les retenues, les doutes, la fierté, l’amour-propre, la peur de déranger, de s’imposer, de peser sur la vie des êtres. Partenaires de la Mort.
Colère, une immense colère. Le dégoût. Pourquoi l’a-t-il abandonné ? Pourquoi l’avoir veillé pendant des mois pour le laisser ensuite combattre seul ?
Le dégoût.
Culpabilité.
La honte.
L’impression de l’avoir porté et soudainement de l’avoir jeté sur le bas-côté. Une fuite.
« Je vous accompagne jusqu’à la salle. »
L’homme s’est levé. Il le suit.
Une porte en bois. Lourde. Un couvercle de tombe.
L’homme s’écarte, il l’invite à rentrer.
Lumières tamisées, des tentures ocres aux murs, deux bougies.
« Voilà, je vous laisse. Je vous attends à côté. Vous pouvez rester aussi longtemps que vous le désirez. »
Il ferme la porte.
« Je ne sortirai plus. Vous pouvez partir. Je reste là. »
Il a failli le dire.
Il avance vers le fond de la pièce. Un silence étouffant. Une odeur de naphtaline.
Un autel. Il est là.
Christian.
Son grand frère.
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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeLun 23 Aoû - 13:47

Assis aux côtés du corps inerte. Le visage apaisé. Les yeux clos. Effroyable immobilité. Les mains sur la poitrine. Il avait caressé les cheveux. Il s’était levé. Il avait posé un baiser sur le front. Rigidité glaciale de la peau. Les larmes. Impossible de les retenir.

« La cour vous condamne à porter l’âme de votre frère jusqu’au jugement dernier. »

La sentence s’était imposée, comme une voix criée au fond de son cœur, au fond de son être, une ancre jetée dans la boue de son esprit, une stèle cimentée dans le cloaque spongieux de son dégoût.
Il porterait sa croix.
C’était son tour.

Il s’était levé. Le froid dans son corps. Comme une mort en repérage. L’impression qu’elle le jaugeait, prenait ses mesures, humait les tissus, léchait les viscères, entrait dans son catalogue de victimes en sursis le code barre qui lui permettrait de l’identifier le moment venu.
Il avait marché quelques pas, des allers retours rapides mais ces mouvements appliqués avaient renforcé l’immobilité cadavérique du grand frère, cette absence de tout alors que le corps était là, cette effroyable contradiction entre l’apparence sereine et le vide intérieur.
Il était retourné s’asseoir. Gêné par sa puissance, son agitation, cette liberté de se mouvoir.

La Mort n’était pas une entité.
L’idée avait surgi.

Elle n’était qu’un état. Celui de la vie envolée. Il avait toujours considéré cette Mort comme un ennemi reconnaissable, une sorte d’ectoplasme armé, une tueuse à l’imagination infinie. Il s’était trompé. C’était évident. Elle n’existait pas elle-même, elle n’était pas l’énergie sombre qu’il imaginait, une force souveraine au service du Mal, un condensé de haine. Elle n’était rien d’autre qu’un état, le nom donné par l’homme à ce vide intérieur, le corps statufié. S’il s’était allongé aux côtés de Christian, dans la même posture, rien dans leur apparence ne les aurait différenciés. Sinon, le mouvement régulier de la poitrine. En lui courait toujours le flux vital. Le corps de Christian en était vidé.
La Mort n’avait rien pris, il n’y avait pas eu de combat mais un abandon. Le flux vital s’était retiré. Il ne restait que l’état de Mort. La veine éclatée n’avait été que le moyen que la vie avait choisi pour s’extraire de cette enveloppe.
Il s’était trompé.
Il ne s’agissait pas de vouloir humilier une Mort inexistante mais d’honorer la Vie. Tant qu’elle était là. S’offrir corps et âme à la Vie. A chaque instant. Sachant qu’elle pouvait disparaître. En une seconde.
En quoi consistait ce flux et pourquoi s’était-il retiré du corps de Christian ?
Il n’avait aucune réponse pour la première interrogation. Pour la seconde, l’hypothèse qui le rongeait l’anéantissait. Cet abattement, cette honte, ce sentiment immonde de trahison. Il n’avait plus rien fait pour son grand frère. Plus rien.

« Pardon Christian. Pardon. »
Il s’était approché, il avait posé une main sur le front glacé et dur.
Tellement de douleurs dans son ventre, une telle brûlure. Les larmes comme un écran devant le corps étendu. Envie de disparaître. Les jambes qui tremblent.
Un baiser.
« Je reviendrai demain. Il faut que je prévienne papa et maman. Je ne sais pas où ils sont. Il faut que je te laisse mais je reviendrai demain, c’est promis. »

Sortir.
L’abandonner. Encore une fois. Il aurait voulu le ramener à la maison.

Il avait marché jusqu’à l’orée de la ville. Auto-stop. Une femme s’était arrêtée.

« Vous êtes en vacances ou vous êtes de la région ?
- Mon frère est mort et je ne sais pas où sont mes parents. Il faut que je les trouve. »
Quelques paroles compatissantes. Elle n’avait plus rien dit.
Il n’avait pas envie de parler.

La maison de son enfance. Les volets clos. Pas de camping-car. Ils étaient partis en voyage. Où ça ? Appeler le portable. Toujours cette maudite messagerie. La voix de sa mère.
« …et laissez nous votre message, nous vous rappellerons. »
Comment le dire ? Dès le premier appel, il avait fallu qu’il se décide.
« Maman, papa, c’est Yoann. Christian est mort. Je vous aime. »
Rien d’autre et puis quoi d’autre ? Ils le rappelleraient de toute façon.
Nouveau message.
« Maman, papa, c’est Yoann. Je suis à Fouesnant. Je vous attends à la maison. »
Le répertoire téléphonique dans le tiroir du buffet. Ecrire une liste, son oncle, des amis proches dont il avait entendu parler.
« Bonjour. C’est Yoann. Je suis à Fouesnant. Christian est mort. Je ne sais pas où sont les parents.»
Expliquer à chaque fois. Retenir les sanglots, rester lucide. Chercher une piste. Personne ne savait. Ses parents n’avaient rien dit. Ca leur arrivait souvent. Ils aimaient prendre la route, partir à l’improviste, ils envoyaient une carte postale. Personne ne savait. Tout le monde allait se renseigner. Tout le monde voulait l’aider.
Il était monté à l’étage. Il avait poussé la porte de la chambre de Christian. Des flots de souvenirs. Sa voix, son rire, sa démarche, des discussions, quelques photos. Les départs matinaux pour les journées d’escalade. Il avait tellement aimé ces instants privilégiés. Ces bonheurs là avaient réussi à effacer sa silhouette squelettique au fond du lit, le retour de l’hôpital, toutes les journées sombres. La force du bonheur, ce pouvoir extraordinaire, cette vie lumineuse. Il s’était dit parfois que sans l’accident ça ne serait sans doute jamais arrivé. Etait-ce le sens de tout ça ou juste une réaction de survie ? Il fallait opposer à la souffrance et à la détresse quelques rayons de joie, c’était essentiel, survivre, ne pas sombrer, préserver le flux vital, continuer d’honorer l’existence. Y avait-il une intention, un cheminement inéluctable, un enseignement à retirer ? Pour lui, peut-être, il en devinait les prémisses. Mais pour Christian ? Tout était fini. Prématurément. Il n’y voyait qu’une injustice. Rien d’autre.
Dieu.
Il s’était allongé sur son lit. Les yeux fixant le plafond.
Dieu.
Il n’aimait aucune religion. Embrigadement insupportable. Les Evangiles, comme le condensé des errances humaines. Mais la question de Dieu. Les écritures ne possédaient aucune explication.
Ce Dieu qui le tourmentait depuis l’hôpital. Pourquoi toutes ces douleurs ? Pourquoi le Mal ? Si Dieu est amour, pourquoi le Mal ? Se poser la question, c’était déjà adhérer à l’existence de Dieu. Mais Dieu ne peut pas vouloir le Mal. Alors, c’est qu’il n’y a aucun Dieu puisque le Mal est là.
Non, ça ne pouvait pas être aussi simpliste.
Il avait toujours senti dans ces réflexions chaotiques une incomplétude et une faiblesse. L’impression que son esprit ne pouvait pas accéder à cette compréhension. Ou plutôt qu’il ne pouvait pas s’agir d’une compréhension. Que le mental était insignifiant dans cette dimension, qu’il ne pouvait même pas l’aborder, qu’il fallait entrer par une autre porte, user d’un autre moyen … Aucune réponse. En se demandant d’ailleurs s’il ne s’agissait pas de la seule conclusion envisageable. Impossibilité d’énoncer une certitude. Rien que le doute. Le questionnement. Les Ecritures avaient imposé le mental, les égos, des convictions humaines envers un mystère divin qu’on pouvait éventuellement ressentir mais qu’il était impossible de décrire.
Fixer le plafond, suspendre l’agitation, fossiliser les gestes, se concentrer sur le mouvement hypnotique de la poitrine, la vie animée dans son réceptacle, cette alternance d’aspiration et de rejet, absorber les particules nourricières, excréter les déchets, le système fonctionnait sans aucune intervention consciente. D’où venait ce mouvement perpétuel, involontaire, cette régularité inexplicable, ce courant énergétique animant l’ensemble, cette impression d’être branché sur un générateur cosmique, toute la Vie bénéficiait de la même source, tous les systèmes vivants s’animaient à travers ce flux, rien à faire, juste recevoir. Et l’aimer.
Il s’était trompé.
Depuis l’hôpital, il était entré en guerre contre la Mort, il avait voulu se dresser, droit et fier, indestructible, agressif, obstiné, sans peur. Il s’était trompé. Il n’y avait pas d’ennemi sinon l’absence d’amour envers le flux vital. Il n’avait pas su aimer. Il avait basculé du côté sombre de l’existence, dans la dimension des ressentis néfastes, la haine, l’amertume, la rancœur, la culpabilité, le dégoût de la Mort.
Lutter contre une engeance imaginaire et délaisser le bonheur. Il s’était fourvoyé. Par arrogance, par prétention, pour exister comme celui qui a vu la Mort, qui a lutté contre elle, qui a soutenu son frère, qui l’a accompagné, qui l’a aidé à se reconstruire.
Et qui l’a abandonné un peu plus tard. Pour une autre identification, d’autres rôles, d’autres prétentions à établir.
Un coup au ventre.
Christian, allongé, dans la salle mortuaire. Il ne bougera plus. Le flux a disparu. Se peut-il qu’il se soit extirpé de l’enveloppe par manque d’attention ? Christian avait basculé dans une lutte constante, un déni de son histoire, une récusation de son état. S’y était-il épuisé ?
Le flux de vie avait-il besoin d’être aimé pour se prolonger ?
Qu’il puisse parcourir l’intégralité du chemin proposé avant de s’éteindre. Aimer la vie la maintenait-elle ? Mais l’amour de soi n’était-il pas nécessaire avant de pouvoir aimer la Vie dans son ensemble ? Christian s’aimait-il assez ? Avant d’aimer ses conditions de vie, aimait-il assez ce qu’il était ?
Il n’aimait sûrement pas ses conditions de vie, il ne s’aimait peut-être pas. Comment aurait-il pu aimer la Vie elle-même ?
Mais qu’en savait-il d’ailleurs ? Depuis si longtemps qu’il ne l’avait vu. Juste des hypothèses, des suppositions comme autant de tourments.
Il aurait dû être près de lui. Il ne devait pas le laisser. Même en partant dans les Alpes, il devait garder le contact. Il aurait pu l’aider.
Les pudeurs et les non-dits avaient cimenté entre eux un mur de silence. Il se disait peut-être que son petit frère ne s’intéressait pas à lui et lui-même se disait que Christian ne supporterait pas son attention, qu’il n’y verrait que de la pitié et il détestait qu’on le regarde comme un individu fragile. Mais toutes ces théories, ils ne les avaient jamais vérifiées, ils s’étaient contentés d’émettre chacun de leur côté un catalogue d’apparences, des défenses, des justifications, des excuses. Ils avaient même fini, pour étouffer les doutes inquisiteurs, par en faire des certitudes. Christian avait-il imaginé dans cette indifférence de son petit frère un désamour profond, et pourquoi pas la preuve de son insignifiance ? Il ne méritait aucune attention, il n’était qu’un handicapé, dépendant du soutien de ses parents, sans amis réels, sans compagne, peut-être même se considérait-il comme un mauvais père puisqu’il ne parvenait pas à offrir à son fils l’enfance que lui, le petit frère, il proposait à Flora, Tom et Loïs ? Est-ce que cette comparaison était devenue une torture, une souffrance inépuisable ? Se disait-il qu’il était le fils raté ?
Est-ce qu’il aurait pu apaiser ses douleurs en restant à ses côtés ?

Il n’aura jamais de réponse.

Leurs silences respectifs les avaient condamnés. Christian à la douleur de la solitude et lui, désormais, à la douleur de l’incertitude, des questions irrésolues, des culpabilités ressassées.
Le silence.
N’était-ce pas ce qu’il reproduisait avec Leslie ? N’était-elle pas dans la même souffrance ?

Ne pas vouloir tout régler dans le même instant. Il se reprend. Epurer les anciens ressentis avant de se questionner sur le présent. Comprendre les refoulements archaïques avant de clarifier les troubles actuels. Remonter à la source au lieu de chercher à surnager dans les eaux troubles de l’océan. Les limons descendent des montagnes. C’est là qu’il doit filtrer les eaux de son histoire.

Que sait-il de la vie de Christian finalement ?
Il avait travaillé pour un sérigraphe. Dépressif, alcoolique, divorcé. Un homme qui l’avait pris sous son aile, lui avait appris le métier, avec passion.

Christian l’avait trouvé pendu dans l’atelier.
C’est lui qui avait coupé la corde.

Il s’était mis à son compte quelques mois plus tard. Un défi. Photographe publicitaire. Il n’avait pas tenu, seul contre la concurrence. Il suivait une autre formation. Il voulait recommencer, créer une nouvelle entreprise.
Ses parents lui avaient dit que Christian était très volontaire, déterminé, qu’il se battait. Sa vie était sans doute bien plus remplie que ce qu’il pensait.
Qu’il se battait.
Jusqu’à l’épuisement.
Il aurait dû l’encourager, le supporter, se montrer enthousiaste, admiratif. Il le méritait tant.
Pourquoi ce silence ?

« La cour vous condamne à porter l’âme de votre frère jusqu’au jugement dernier. »

Il faut qu’il s’arrête. Qu’il cesse de marcher pour mettre un terme au défilement déchirant des souvenirs. Des rouleaux de barbelés qui le lacèrent.
Un sous-bois de résineux, une petite clairière, cent mètres sur la gauche du chemin. Pas de ruisseau. Tant pis pour la toilette, il a assez d’eau pour le repas. S’occuper, monter la tente, préparer un feu, faire sécher les chaussettes, le tee short, essayer de manger. Dormir surtout. Et ne plus penser. Laisser couler en lui la nausée des mots, la couvrir de quelques aliments, mâcher consciencieusement, fixer les flammes, sombrer dans le vide intérieur, être en absence, dans le silence.





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Thierry
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Thierry



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MessageSujet: Re: La rationalité   La rationalité Icon_minitimeLun 23 Aoû - 13:49

Trois jours. Il lui avait fallu trois jours pour que l’idée s’impose.
Un transfert d’appel.
Demander à l’opérateur téléphonique de basculer un appel de ses parents à Christian sur le poste de la maison. C’est lui qui décrocherait.

Il était retourné à la morgue. Le costume gris lui avait dit qu’il fallait organiser la crémation. Qu’on ne pourrait pas attendre plus longtemps.
Il avait imaginé le retour de ses parents. L’urne funéraire posée dans le salon. Christian en cendres. Ca n’était pas possible. Il fallait qu’ils le voient. Cette pression effroyable dans son ventre, comme une bête fouissant ses entrailles. Il aurait voulu crier si fort que son appel leur parvienne, effacer les distances, suspendre les bruits du monde, que son amour les relie, que les avions se taisent, que tous les moteurs s’arrêtent, que les oiseaux même suspendent leurs vocalises, que le silence transfère ses cris, que le vent porte sa détresse, connexion rétablie.
La douleur comme un flux électrique courant dans l’espace.
Christian allongé dans l’attente des flammes. Le corps glacé comme un obstacle au feu. Il ne pouvait s’empêcher d’imaginer les brûlures dévorantes, les peaux fondues, le visage ravagé, les viscères dissoutes, l’embrasement gigantesque dans la fournaise hurlante. Il se voyait dans la boîte close cherchant une issue.
Que l’âme au moins s’échappe.
Que l’âme au moins survive.
Qu’il reste l’essentiel.

Les volets fermés, il somnolait dans le salon lorsque le téléphone avait sonné. La torpeur avait volé en éclat. La sonnerie comme un cri de parents, la voix déchirée par la douleur. Il avait décroché en tremblant.

« Allo, Christian, c’est maman. »

Le souffle coupé.
Ils n’avaient pas écouté leur messagerie.
Ils ne savaient rien. Ils ne savaient rien.

Une tornade, un brasier sous sa peau, les entrailles déchiquetées, les mots cimentés au fond de sa gorge, les lèvres qui tremblent.

« Maman, c’est moi, c’est Yoann.
- Yoann ? Oh, pardon, mon chéri, je me suis trompé de numéro, je voulais appeler Christian. »

Respirer. Retenir les larmes. La voix de sa mère. Il aurait voulu la tenir dans ses bras.

« Maman. Je suis à la maison, à Fouesnant. J’ai essayé de vous avoir sur votre portable. Maman … »

Respirer.

« Tu es à Fouesnant Yoann ? Mais ?
- Maman … Christian est mort. »

Tellement de larmes. Ses parents dans ses bras. Le rictus du drame sur leurs visages laminés. Leur culpabilité.
« Tu en as déjà tant fait pour Christian. Et c’est encore toi qui viens t’occuper de lui.
- Ca n’est pas important papa. Personne ne pouvait deviner ce qui allait se passer. »
Tellement de larmes.
« On passait juste quelques jours vers Lorient. On n’a pas écouté le téléphone. Il est toujours éteint. On ne l’allume que pour appeler.
- C’est pas grave papa. Ce qui compte, c’est que vous soyez là. »

Et la nuit, enfin, le soulagement. Il pouvait partager la douleur désormais, se soulager du fardeau. L’impression qu’ils en avaient pris une part, qu’il avait pu déposer le corps de Christian dans leurs bras. Relâcher. S’abandonner.

La morgue. Ses parents effondrés devant le corps de leur fils, la voix brisée de son père, sa mère en larmes, les visages ravagés, ces sillons sur sa peau comme des lits de rivières, la famille, les amis, le trajet jusqu’au funérarium, le sermon du curé, il les avait invités à venir voir le cercueil entrer dans le four, la grande caisse en bois qui glisse sur des rouleaux métalliques, les portes qui se ferment, disparition,
« Au revoir Christian. Je t’aime.»
Il n’avait rien pu dire d’autre.
Un voyant qui s’allume, le ronflement des brûleurs.
Un frisson de lave dans ses fibres.

Le retour à la maison. L’urne posée sur la table du salon. L’âme était-elle dissoute dans ce tas de cendres ? N’était-ce qu’un corps vidé de son entité vibratoire ? Il n’avait pas osé en parler.
Trop de douleurs autour du réceptacle.

Il était rentré dans les Alpes. Fin de son congé. Il devait reprendre sa classe.
Ses parents avaient voulu garder Christian à leurs côtés.
Ils avaient attendu plusieurs jours avant de plonger l’urne dans l’océan. Sa mère était restée sur la plage. Assise sur le sable. Un ami, propriétaire d’un bateau à moteur, avait accompagné son père à quelques encablures de la côte.
Ils avaient raconté la cérémonie d’adieu au téléphone. Chacun son tour prenant le combiné lorsque les larmes étouffaient les mots.
Il était loin. Loin de tout ça. Un détachement qu’il ne s’expliquait pas. Comme un cordon sectionné. Une armure reconstituée. Un refus des douleurs. Il n’avait plus de place en lui. Comme une implosion à peine contenue. En croyant se protéger, il succombait à la fermentation des questions irrésolues …
Il ne le savait pas encore.

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