philo Z'amis
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| Poésie | |
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+17Thierry marie-josé zilia Frank fazotadje stip dombom anémone Fany Rime clementine Lisa Brumes Marie-jo 17 Nelly Charlestone renal 21 participants | |
Auteur | Message |
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anémone ******
| | | | marie-josé ******
| Sujet: Re: Poésie Lun 19 Nov - 17:43 | |
| l'automne
Les feuilles mortes qui m'emportent Dans un univers joyeux. Peu importe,ces couleurs fortes, ces rouges et jaunes, me rendent heureux.
Dans le ciel sombre qui fait de l'ombre, les arbres brûlent de mille feux. La nature se repose de là ma prose L'automne arrive dans nos milieux.
Rose | |
| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Lun 19 Nov - 18:21 | |
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Sam 24 Nov - 8:03 | |
| Il n’y a qu’à vouloir
Je voudrais t’aimer De pain blanc De four tiède De cire d’abeille.
T’aimer De fleur sauvage De miel clair De thym et de lavande
T’aimer de rosée du matin D’aubépine à midi Et d’ombre propice le soir.
Pour que toutes nos journées Soient au comble de toi Et choses si simples Forment l’évidence Qu’il fait simplement bon près de toi
Claude Haller (extrait de « poème du petit matin »
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| | | Nelly Admin
| Sujet: Re: Poésie Sam 24 Nov - 16:52 | |
| - renal a écrit:
Claude Haller (extrait de « poème du petit matin »
C'est même agréable le soir... | |
| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Sam 15 Déc - 17:19 | |
| Il arrivait parfois ….
Il arrivait parfois que ma mère, Après avoir coupé le pain Et mis sur la table les verres Sa cachât les yeux dans les mains.
D’abord, nous ne remarquions rien, Mais brusquement, entre les doigts, Une larme coulait à terre, Et nous nous regardions, pantois.
Personne n’osait parler. Et, surprise par le silence Que semblait répandre la lampe, Ma mère, comme réveillée
D’un étrange songe intérieur, Baissait les mains et, souriant De nous voir émus, balbutiait : « Oh ! Ce n’est rien », sans que jamais Nous n’ayons su si c’était vrai.
Maurice Carême
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Sam 15 Déc - 17:20 | |
| Au creux de l’ombre
Pour épargner l’huile et la mèche, On n’allumait jamais la lampe Avant que le soir, bien à l’aise Se fût installé dans la chambre.
Le buffet était le premier A entrer sans façon dans l’ombre Qui allait faire ressembler La cuisine à un autre monde.
Puis c’était la table où les bols De lait mettaient une pâleur Etrange et pleine de douceur Où semblaient passer des lucioles ;
Par les fentes de son couvercle, Le poêle, comme un magicien, Faisait naître partout des cercles Scintillants et mourant sans fin.
De ma mère, je ne voyais Plus que les mains continuant Malgré l’obscurité croissant A faire ce qu’elle devait.
Et, tranquille, je restais là Si bien caché au creux de l’ombre Que l’on aurait pu me confondre Avec tout ce qui était là.
Maurice Carême
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| | | marie-josé ******
| Sujet: Re: Poésie Sam 15 Déc - 18:41 | |
| merci Nicole,
où étais tu ces dernier temps? | |
| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Sam 15 Déc - 20:53 | |
| A la maison, mais assez occupée, avec le caté, le travail et fatiguée par un gros rhume. sinon tout vas bien. Je serais là lundi sur le forum, pour te faire de gros gros bisous.
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| | | stip ******
| Sujet: Re: Poésie Dim 16 Déc - 9:32 | |
| - renal a écrit:
- A la maison, mais assez occupée, avec le caté, le travail et fatiguée par un gros rhume. sinon tout vas bien. Je serais là lundi sur le forum, pour te faire de gros gros bisous.
2 merveilleux textes, ma grande! C'était toujours un plaisir pour moi, quand une instit choisissait Maurice Carême pour récitation ..... On en avait 2 par mois environ. En plus (je jure que c'est vrai ) ce qui ajoutait au plaisir était son nom. il m'évoquait l'époque des crêpes dans la chaleur de notre appartement, un moment de l'année privilégié. C'eût été plus évident avec un prénom comme ...... Sami mais avec Maurice, ça le fait aussi, comme disent les gosses. | |
| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Dim 16 Déc - 12:22 | |
| En effet Stip, c'est un grand Monsieur.!!
Les hauts peupliers
Mon père aimait les chênes ; Ma mère les sorbiers, Moi, j’aimais les fontaines Et les hauts peupliers.
De ma chambre d’enfant, Je les voyais jouer Comme des lévriers Avec le chat du vent.
Leurs jeux, dans le soleil, Jetaient sur mon cahier Des ombres mordorées Et des morceaux de ciel.
Ce qu’ils devenaient calmes Lorsque tombait le soir ! Sur leurs branches étales, Ils prenaient des étoiles.
Et tout en les berçant, Me berçais si longtemps Qu’à mon tour, en rêvant, Je me voyais, jouant, Etoile dans le vent.
Maurice Carême extrait de « Souvenir » | |
| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Mar 18 Déc - 8:24 | |
| Carillons de Noël
Le vieux sonneur monte au clocher, Jusqu'aux meurtrières béantes Où les corneilles vont nicher, Et, chétif, il vient se percher Au milieu des poutres géantes.
Dans les ténèbres où ne luit Qu'un falot pendant aux solives, II s'agite et mène grand bruit Pour mettre en danse cette nuit Les battants des cloches massives.
Joyeuses, avec un son clair, Les voix des cloches, par le faîte Des lucarnes, s'en vont dans l'air Sur les ailes du vent d'hiver, Comme des messagers de fête.
Noël ! Noël !... Sur les hameaux Où les gens rentrent à la brune, Sur les bois noirs et sur les eaux Où tout un peuple de roseaux Frissonne au lever de la lune,
Noël !... Sur la ferme là-bas, Dont la vitre rouge étincelle, Sur la grand'route où, seul et las, Le voyageur double le pas, Partout court la bonne nouvelle...
Oh ! ces carillons argentins Dans les campagnes assombries, Quels souvenirs doux et lointains, Quels beaux soirs et quels doux matins Ressuscitent leurs sonneries !
Jadis ils me versaient au cœur Une allégresse chaude et tendre J'ai beau vieillir et passer fleur, Je retrouve joie et vigueur, Aujourd'hui, rien qu'à les entendre...
Et cette musique de l'air, Cette gaîté sonore et pleine, Ce chœur mélodieux et clair Qui s'en va dans la nuit d'hiver Ensoleiller toute la plaine,
C'est l'œuvre de ce vieux sonneur Qui, dans son clocher solitaire, Fait tomber, ainsi qu'un vanneur, Cette semence de bonheur Sur tous les enfants de la terre.
André Theuriet[img] [/img] | |
| | | anémone ******
| Sujet: Re: Poésie Mar 18 Déc - 10:17 | |
| Merci Nicole, toujours à la recherche de beaux textes... | |
| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Dim 30 Déc - 18:30 | |
| SOIR D'AUTOMNE
Que de choses restaient à faire Lorsque venaient les feuilles mortes ! S'asseoir sur le seuil de la porte Était défendu à ma mère.
Mais il arrivait que l'automne Fasse ressembler notre rue, Distillant sa lumière jaune, À une étonnante cornue.
Ma mère aimait cette atmosphère De soir tombant dans la rue calme Où l'on sentait que les étoiles Ne demandaient plus qu'à paraître.
Assis par terre, tout près d'elle, La tête contre son genou, Je regardais rosir le ciel Que désertaient les hirondelles.
Et j'écoutais battre mon cœur Comme devait battre le sien Comblé d'un étrange bonheur Qui ne tenait à presque rien.
Maurice Carême (extrait de souvenir)
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Dim 30 Déc - 18:31 | |
| SUR LE CIEL ÉCARLATE
Oui, les maisons étaient trop vieilles ; Les escaliers, trop hauts, Mais nous avions dans les oreilles Mille chansons d'oiseaux.
Oui, les chemins étaient trop longs Et criblés de poussière, Mais, devant nous, les horizons Frissonnaient de lumière.
Oui, nos souliers étaient trop lourds; Nos besaces, trop plates, Mais nous voyions au loin les tours Briller ainsi que des visages Sur le ciel écarlate.
Maurice Carême (extrait de souvenir)
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| | | Morgan Kane Admin
| Sujet: Re: Poésie Dim 30 Déc - 20:38 | |
| LA CANAILLE
Paroles : Alexis Bouvier Musique : Joseph Darcier Editeur : Vieillot
Cette chanson a été rendue célèbre par la Commune de Paris en 1871.
Dans la vieille cité française Existe une race de fer, Dont l’âme comme une fournaise A de son feu bronzé la chair. Tous ses fils naissent sur la paille, Pour palais, ils n’ont qu’un taudis. C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis !
Ce n’est pas le pilier du bagne ; C’est l’honnête homme dont la main Par la plume ou le marteau gagne, En suant, son morceau de pain. C’est le père, enfin, qui travaille Les jours et quelquefois les nuits. C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis !
C’est l’artiste, c’est le bohème Qui, sans souper, rime rêveur Un sonnet à celle qu’il aime, Trompant l’estomac par le cœur. C’est à crédit qu’il fait ripaille, Qu’il loge et qu’il a des habits. C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis !
C’est l’homme à la face terreuse, Au corps maigre, à l’œil de hibou, Au bras de fer à main nerveuse Qui sortant d'on ne sait pas où, Toujours avec esprit vous raille, Se riant de votre mépris. C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis !
C’est l’enfant que la destinée Force à rejeter ses haillons, Quand sonne sa vingtième année, Pour entrer dans nos bataillons. Chair à canon de la bataille, Toujours il succombe sans cris… C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis !
Ils fredonnaient la Marseillaise, Nos pères, les vieux vagabonds, Attaquant en quatre-vingt-treize Les bastilles dont les canons Défendaient la vieille muraille ! Que de trembleurs ont dit depuis : « C’est la canaille ! » Eh bien ! j’en suis !
Les uns travaillent par la plume, Le front dégarni de cheveux. Les autres martèlent l’enclume, Et se soûlent pour être heureux ; Car la misère, en sa tenaille, Fait saigner leurs flancs amaigris... C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis !
Enfin, c’est une armée immense, Vêtue en haillons, en sabots. Mais qu’aujourd’hui la vieille France Les appelle sous ses drapeaux, On les verra dans la mitraille, Ils feront dire aux ennemis : C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis !
Patrie et Révolution ne sont pas incompatibles .... _________________ Tout smouales étaient les borogoves
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Mar 1 Jan - 18:46 | |
| L’enfant des bonheurs sans raison
Je voudrais ne laisser de moi Que l’image de cet enfant Qui regardait durant des heures Sur les plumes d’or des faisans, Enfant aux lanternes magiques Qui faisaient naître sur les murs Des arabesques de verdures Et de beaux visages bibliques, Enfant du vent aux hirondelles, Du pain frais qui sentait si bon, Des jeux repris à la chandelle, Enfant des bonheurs sans raison Qui croyait sa mère éternelle.
Maurice Carême
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Jeu 3 Jan - 18:33 | |
| Je dépose ce poème pour tous les poètes du forum, il est vraiment beau.
J’écris
Lorsque j’étais enfant Fallait-il être fou ! J’écrivais sur un banc Des lettres au coucou.
A vingt ans, le bel âge ! Les hommes sont naïfs, Je gravais dans les arbres Des prénoms au canif.
A trente, émerveillé De me croire poète, Je couvrais mes cahiers De strophes imparfaites.
A quarante, déjà, Je me pris par la main. Je voudrais être moi ; Je me cherchais en vain.
A cinquante, c’est Dieu Qui vint me tourmenter J’ai alors essayé De faire ce qu’Il veut.
A soixante, le doute Me reprit la gorge. J’œuvrais comme l’on forge Le fer que l’on redoute.
Maintenant, assagi, Humblement, comme on prie, J’écris sur les genoux Ce que le cœur me dit.
Maurice Carême (extrait de « Souvenir »)
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Sam 12 Jan - 17:34 | |
| Va mon âme
Va, mon âme, prends ta chandelle. Tu la rencontreras, ma mère, Marchant, humble comme naguère, Dans l’avenue des Acacias. Toi qui vois ce que nul ne voit, Mon âme, tu me conteras D’où elle vient, où elle va, Et si son sourire est toujours Celui-là qu’elle avait pour moi Quand je lui parlais à mi-voix Du bol de lait qui, sur la table, Me faisait trouver ineffable L’image même du destin Inscrit aux lignes de mes mains.
Maurice Carême (extrait de « Souvenir »)
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Ven 18 Jan - 6:30 | |
| Nuit de neige
La grande plaine est blanche, immobile et sans voix. Pas un bruit, pas un son ; toute vie est éteinte. Mais on entend parfois, comme une morne plainte, Quelque chien sans abri qui hurle au coin d'un bois.
Plus de chansons dans l'air, sous nos pieds plus de chaumes. L'hiver s'est abattu sur toute floraison. Des arbres dépouillés dressent à l'horizon Leurs squelettes blanchis ainsi que des fantômes.
La lune est large et pâle et semble se hâter. On dirait qu'elle a froid dans le grand ciel austère. De son morne regard elle parcourt la terre, Et, voyant tout désert, s'empresse à nous quitter.
Et froids tombent sur nous les rayons qu'elle darde, Fantastiques lueurs qu'elle s'en va semant ; Et la neige s'éclaire au loin, sinistrement, Aux étranges reflets de la clarté blafarde.
Oh ! la terrible nuit pour les petits oiseaux ! Un vent glacé frissonne et court par les allées. Eux, n'ayant plus l'asile ombragé des berceaux, Ne peuvent pas dormir sur leurs pattes gelées. Dans les grands arbres nus que couvre le verglas Ils sont là, tout tremblants, sans rien qui les protège ; De leur œil inquiet ils regardent la neige, Attendant jusqu'au jour la nuit qui ne vient pas.
Guy de Maupassant (extrait de 100 récitations de notre enfance)
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| | | marie-josé ******
| Sujet: Re: Poésie Ven 18 Jan - 10:17 | |
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| | | anémone ******
| Sujet: Re: Poésie Ven 18 Jan - 10:58 | |
| Merci Nicole, très beau, même si j'ai horreur de la neige ! | |
| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Mer 23 Jan - 8:54 | |
| Au cœur du silence
La plaine était immense Et immense, les bois, J’y passais mes vacances Comme sur un trois-mâts. Dans la hune des branches, J’abordais quelque fois Au cœur bleu du silence. Et je demeurais là Au milieu des mésanges Qui retenaient leur voix Sans comprendre pourquoi J’étais si malhabile A lire l’évangile D’un humble bout de bois.
Maurice Carême extrait de « Souvenirs »
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Mer 23 Jan - 8:56 | |
| [img] [/img] | |
| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Mar 5 Fév - 11:28 | |
| Jeanne était au pain sec…
Jeanne était au pain sec dans le cabinet noir, Pour un crime quelconque, et, manquant au devoir, J'allai voir la proscrite en pleine forfaiture, Et lui glissai dans l'ombre un pot de confiture Contraire aux lois. Tous ceux sur qui, dans ma cité, Repose le salut de la société, S'indignèrent, et Jeanne a dit d'une voix douce: -Je ne toucherai plus mon nez avec mon pouce; Je ne me ferai plus griffer par le minet. Mais on s'est récrié: - Cette enfant vous connaît; Elle sait à quel point vous êtes faible et lâche. Elle vous voit toujours rire quand on se fâche. Pas de gouvernement possible. À chaque instant L'ordre est troublé par vous ; le pouvoir se détend ; Plus de règle. L'enfant n'a plus rien qui l'arrête. Vous démolissez tout. - Et j'ai baissé la tête, Et j'ai dit: -Je n'ai rien à répondre à cela, J'ai tort. Oui, c'est avec ces indulgences-là Qu'on a toujours conduit les peuples à leur perte. Qu'on me mette au pain sec. -Vous le méritez, certes, On vous y mettra. - Jeanne alors, dans son coin noir, M'a dit tout bas, levant ses yeux si beaux à voir, Pleins de l'autorité des douces créatures : - Eh bien, moi, je t'irai porter des confitures.
Victor Hugo (L’art d’être Grand Père) (extrait du livre « Les enfants en poésie »)
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Mer 6 Fév - 10:53 | |
| Proximité de l’être aimé
Je pense à toi, lorsque les lueurs du soleil Brillent dans la mer. Je pense à toi, lorsque le scintillement de la lune Se mire dans les sources.
Je te vois, lorsqu’au loin sur le chemin La poussière se soulève, Dans la nuit profonde, lorsque sur l’étroit sente Le voyageur tressaille.
Je t’entends, lorsque des murmures étouffés La vague monte là-bas. Dans le paisible bosquet je vais souvent pour écouter Quand tout se tait.
Je suis auprès de toi, aussi loin sois-tu, Tu es près de moi. Le soleil baisse, bientôt brilleront les étoiles. Ah ! Si tu étais là !
Goethe (poésie allemande)
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| | | Nelly Admin
| Sujet: Re: Poésie Mer 6 Fév - 16:13 | |
| - renal a écrit:
- Proximité de l’être aimé
Je suis auprès de toi, aussi loin sois-tu, Tu es près de moi. Le soleil baisse, bientôt brilleront les étoiles. Ah ! Si tu étais là ! Il reviendra, Nicole, c'est promis ! | |
| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Dim 10 Fév - 8:38 | |
| Ce qui se passait Aux Feuillantines vers 1813
Enfants ! aimez les champs, les vallons, les fontaines, Les chemins que le soir emplit de voix lointaines, Et l'onde et le sillon, flanc jamais assoupi, Où germe la pensée à côté de l'épi. Prenez-vous par la main et marchez dans les herbes ; Regardez ceux qui vont liant les blondes gerbes ; Epelez dans le ciel plein de lettres de feu, Et, quand un oiseau chante, écoutez parler Dieu.
(Victor Hugo extrait de Les rayons et les ombres 1840)
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| | | Morgan Kane Admin
| Sujet: Re: Poésie Dim 10 Fév - 13:24 | |
| Baudelaire Don Juan aux enfers
Quand Don Juan descendit vers l'onde souterraine Et quand il eut donné son obole à Charon, Un sombre mendiant, œil fier comme Antisthène, D'un bras vengeur et fort saisit chaque aviron. Montrant leurs seins pendants et leurs robes ouvertes, Des femmes se tordaient sous le noir firmament, Et, comme un grand troupeau de victimes offertes, Derrière lui traînaient un long mugissement. Sganarelle en riant lui réclamait ses gages, Tandis que Don Luis avec un doigt tremblant Montrait à tous les morts errant sur les rivages Le fils audacieux qui railla son front blanc. Frissonnant sous son deuil, la chaste et maigre Elvire, Près de l'époux perfide et qui fut son amant, Semblait lui réclamer un suprême sourire Où brillât la douceur de son premier serment. Tout droit dans son armure, un grand homme de pierre Se tenait à la barre et coupait le flot noir ; Mais le calme héros, courbé sur sa rapière, Regardait le sillage et ne daignait rien voir _________________ Tout smouales étaient les borogoves
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Lun 11 Fév - 18:44 | |
| Un soir d’hiver
Quand à la fenêtre la neige tombe, Que longuement la cloche du soir sonne, Pour beaucoup la table est mise Et la maison est bien pourvue.
Plus d’un, parti en voyage, Arrive à la porte par de sombres sentiers. D’or l’arbre des grâces fleurit, De la terre et de sa fraîche vigueur.
Voyageur entre en paix ; La douleur pétrifia le seuil. Alors brillent dans une clarté pure Sur la table pain et vin.
Georg Trakl (poésie allemande)
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Mer 20 Fév - 8:47 | |
| N’aie pas peur
Quand tu ne vois plus le ciel, cela s'appelle une chambre. ; Quand tu ne vois plus les arbres, cela s'appelle un mur. Quand tu cries après ta maman et qu'elle ne répond pas, cela s'appelle la distance. Quand tu ne vois plus rien, cela s'appelle la nuit. N'aie pas peur: dans le mur il y a des lucarnes pour imaginer les arbres invisibles. N’aie pas peur Ta maman est toujours là, Malgré la distance, Malgré l’espace, Malgré la nuit : Elle est au fond de ton cœur.
Alain Bosquet (Extrait du livre « Les enfants en poésie »)
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| | | anémone ******
| Sujet: Re: Poésie Mer 20 Fév - 9:51 | |
| Merci Nicole, très beau...Bises | |
| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Sam 2 Mar - 7:58 | |
| Je me souviens de cette école.
Je me souviens de cette école Où nous revenions en septembre. L’ombre y jouait à pigeon vole. Nos bancs sentaient la nouvelle encre.
Les froids précoces aux carreaux Suspendaient d’étranges rideaux. Roi dans les barres, chat perche, Nous ne rêvions que de grands prés.
Nous regardions par la fenêtre Les nuées flâner dans le vent. Caressante, la voix du maître Avait un parfum d’origan.
On avait repeint les tableaux. Les lettres semblaient si blanches, Elles nous rappelaient les branches Lourdes d’ombelles des sureaux.
Et le cœur enserré Qu’une noisette dans sa coque, Nous attendions tous que la cloche Fît des oiseaux de nos cahiers.
Maurice Carême (extrait de « Souvenir »)
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| | | Morgan Kane Admin
| Sujet: Re: Poésie Sam 2 Mar - 14:10 | |
| L'affiche rouge
Aragon
Vous n'avez réclamé ni gloire ni les larmes Ni l'orgue ni la prière aux agonisants Onze ans déjà que cela passe vite onze ans Vous vous étiez servis simplement de vos armes La mort n'éblouit pas les yeux des Partisans
Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants L'affiche qui semblait une tache de sang Parce qu'à prononcer vos noms sont difficiles Y cherchait un effet de peur sur les passants
Nul ne semblait vous voir Français de préférence Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant Mais à l'heure du couvre-feu des doigts errants Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA FRANCE
Et les mornes matins en étaient différents Tout avait la couleur uniforme du givre A la fin février pour vos derniers moments Et c'est alors que l'un de vous dit calmement Bonheur à tous Bonheur à ceux qui vont survivre Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand
Adieu la peine et le plaisir Adieu les roses Adieu la vie adieu la lumière et le vent Marie-toi sois heureuse et pense à moi souvent Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses Quand tout sera fini plus tard en Erivan
Un grand soleil d'hiver éclaire la colline Que la nature est belle et que le coeur me fend La justice viendra sur nos pas triomphants Ma Mélinée ô mon amour mon orpheline Et je te dis de vivre et d'avoir un enfant
Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent Vingt et trois qui donnaient le coeur avant le temps Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir Vingt et trois qui criaient la France en s'abattant _________________ Tout smouales étaient les borogoves
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| | | marie-josé ******
| Sujet: Re: Poésie Sam 2 Mar - 17:45 | |
| J'arrive où je suis étranger
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Rien n'est précaire comme vivre Rien comme être n'est passager C'est un peu fondre comme le givre Et pour le vent être léger J'arrive où je suis étranger
Un jour tu passes la frontière D'où viens-tu mais où vas-tu donc Demain qu'importe et qu'importe hier Le coeur change avec le chardon Tout est sans rime ni pardon
Passe ton doigt là sur ta tempe Touche l'enfance de tes yeux Mieux vaut laisser basses les lampes La nuit plus longtemps nous va mieux C'est le grand jour qui se fait vieux
Les arbres sont beaux en automne Mais l'enfant qu'est-il devenu Je me regarde et je m'étonne De ce voyageur inconnu De son visage et ses pieds nus
Peu a peu tu te fais silence Mais pas assez vite pourtant Pour ne sentir ta dissemblance Et sur le toi-même d'antan Tomber la poussière du temps
C'est long vieillir au bout du compte Le sable en fuit entre nos doigts C'est comme une eau froide qui monte C'est comme une honte qui croît Un cuir à crier qu'on corroie
C'est long d'être un homme une chose C'est long de renoncer à tout Et sens-tu les métamorphoses Qui se font au-dedans de nous Lentement plier nos genoux
O mer amère ô mer profonde Quelle est l'heure de tes marées Combien faut-il d'années-secondes A l'homme pour l'homme abjurer Pourquoi pourquoi ces simagrées
Rien n'est précaire comme vivre Rien comme être n'est passager C'est un peu fondre comme le givre Et pour le vent être léger J'arrive où je suis étranger
Louis Aragon
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| | | Morgan Kane Admin
| Sujet: Re: Poésie Sam 2 Mar - 19:09 | |
| Est-ce ainsi que les hommes vivent
Tout est affaire de décor Changer de lit changer de corps À quoi bon puisque c'est encore Moi qui moi-même me trahis Moi qui me traîne et m'éparpille Et mon ombre se déshabille Dans les bras semblables des filles Où j'ai cru trouver un pays. Coeur léger coeur changeant coeur lourd Le temps de rêver est bien court Que faut-il faire de mes nuits Que faut-il faire de mes jours Je n'avais amour ni demeure Nulle part où je vive ou meure Je passais comme la rumeur Je m'endormais comme le bruit. C'était un temps déraisonnable On avait mis les morts à table On faisait des châteaux de sable On prenait les loups pour des chiens Tout changeait de pôle et d'épaule La pièce était-elle ou non drôle Moi si j'y tenais mal mon rôle C'était de n'y comprendre rien
Est-ce ainsi que les hommes vivent Et leurs baisers au loin les suivent
Dans le quartier Hohenzollern Entre La Sarre et les casernes Comme les fleurs de la luzerne Fleurissaient les seins de Lola Elle avait un coeur d'hirondelle Sur le canapé du bordel Je venais m'allonger près d'elle Dans les hoquets du pianola. Le ciel était gris de nuages Il y volait des oies sauvages Qui criaient la mort au passage Au-dessus des maisons des quais Je les voyais par la fenêtre Leur chant triste entrait dans mon être Et je croyais y reconnaître Du Rainer Maria Rilke.
Est-ce ainsi que les hommes vivent Et leurs baisers au loin les suivent.
Elle était brune elle était blanche Ses cheveux tombaient sur ses hanches Et la semaine et le dimanche Elle ouvrait à tous ses bras nus Elle avait des yeux de faÏence Elle travaillait avec vaillance Pour un artilleur de Mayence Qui n'en est jamais revenu. Il est d'autres soldats en ville Et la nuit montent les civils Remets du rimmel à tes cils Lola qui t'en iras bientôt Encore un verre de liqueur Ce fut en avril à cinq heures Au petit jour que dans ton coeur Un dragon plongea son couteau Est-ce ainsi que les hommes vivent Et leurs baisers au loin les suivent
Louis Aragon _________________ Tout smouales étaient les borogoves
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Dim 3 Mar - 8:22 | |
| La vie aux Champs
Dès que suis assis, les voilà tous qui viennent C’est qu’ils savent que j’ai leurs goûts ; ils se souviennent Que j’aime comme eux l’air, les fleurs, les papillons, Et les bêtes qu’on voit courir dans les sillons. Ils savent que je suis un homme qui les aime, Un être auprès duquel on peut jouer, et même Crier, faire du bruit, parler à haute voix ; Que je riais comme eux et plus qu’eux autrefois, Et qu’aujourd’hui, sitôt qu’à leurs ébats j’assiste, Je leur souris encor, bien que je sois plus triste. Ils disent, doux amis, que je ne sais jamais Me fâcher ; qu’on s’amuse avec moi ; que je fais Des choses en cartons, des dessins à la plume ; Que je raconte, à l’heure où la lampe s’allume, Oh ! des contes charmants qui vous font peur la nuit, Et qu’enfin je suis doux, pas fier et fort instruit. Ainsi, dès qu’on m’a vu : « Le voilà ! » tous accourent Ils quittent jeux, cerceaux et balles ; ils m’entourent Avec leurs beaux grands yeux d’enfants, sans peur, sans fiel, Qui semblent toujours bleus, tant on y voit le ciel !
Victor Hugo, extrait de « Les enfants en poésie »
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Dim 3 Mar - 8:30 | |
| Aux fenêtres du temps
Aux fenêtres du temps, J’ai regardé le monde. Je me suis vu, enfant, Jouant tout seul dans l’ombre.
Que faisais-je, riant Dans les herbes profondes ? Aux fenêtres du temps S’enfuyait les colombes.
Je me voyais parlant Comme l’on parle en songe Dressé sur le ciel sombre Ainsi qu’un rosier blanc Aux fenêtres du temps.
Maurice Carême (Extrait de « Souvenir »)
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Mar 5 Mar - 10:26 | |
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| | | anémone ******
| Sujet: Re: Poésie Mar 5 Mar - 10:36 | |
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Mer 6 Mar - 7:20 | |
| Les fleurs du papier de ta chambre
« Nous sommes sur le mur Et ne sommes pas dures, Nous avons un parfum Plus léger que nature Et qui sent un jardin Dans les pays futurs Ou les pays anciens, C'est là notre parure. Et nous nous répétons, Du parquet au plafond, Crainte d'être incomprises, Parce que nous n'avons Ni fraîcheur ni saisons Ciel, abeilles ni brises. » Une main sur le mur, C'est l'enfant qui s'éveille, Elle a grand'peur, allume, Le papier de la chambre À soi-même est pareil, Il veille et l'accompagne. Le pied touche le bois Du lit toujours sérieux Qui lui dit dans ses voix : «Ce n'est pas l'heure encore De partir pour l'école.» Anita se rendort Dans le calme parfum De son papier à fleurs Dont les belles couleurs Ignorant le repos Dans la nuit, à tâtons, Sans se tromper jamais Élaborent l'aurore.
Jules Supervielle (extrait du livre « Les enfants en poésie »)
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| | | Colombe ***
| Sujet: Re: Poésie Jeu 7 Mar - 1:03 | |
| C'est court, mais j'aime bien le message.
Le corâme
Ruisseau s’écoule sur la falaise liliale Il aboutit sur l’épaule de son vassal À cinq chevaliers, ils vont à la rescousse De l’orchidée qui tente de perdre son émousse
Bourgeons déployés, mais amour indéfini Abysses du cœur tourmenté ne sont pas guéris Mais, épée à la main et poing bien haut levé Elle retrouve le courage de persévérer
Parades, esquives, flèches avec agilité Mais, elle continue malgré les intempéries Elle sait que personne n’est à l’abri du mépris La créature de justice en est désolée
Mais, c’est le prix à payer pour vivre ici Sous cette pauvre et belle enveloppe charnelle Qui est extrêmement loin d’être éternelle Le prix est cher payer pour malmener la vie
- Mystisch
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| | | renal ******
| | | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Jeu 7 Mar - 8:32 | |
| Chanson à boire le punch
Quatre éléments Intimement assemblés Forment la vie, Edifient le monde.
Pressez du citron La juteuse étoile, Amer est au plus intime Le noyau de la vie.
A présent avec la saveur Apaisante du sucre Tempérez la force Amère et brûlante.
Versez l’eau En jets ondoyants. Qu’elle envahisse Paisiblement le tout
Ajoutez-y Un zeste d’esprit, Lui seul donne La vie à la vie.
Avant que cela ne s’évapore Puisez-le vite Car ce n’est que brûlante Que la source désaltère.
Friedrich Schiller (Poésie allemande)
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Ven 15 Mar - 8:34 | |
| La rue qui t’a vu naître
Malgré ses murs bas et ternis, L’étroite rue qui t’a vu naître Te fut toujours une fenêtre Large ouverte sur l’infini.
Les matinées étaient si belles Que, jaillissant partout des bois, Des oiseaux au cœur de leurs ailes Se suspendaient au bord des toits.
La campagne allégée de pies Passait entre les contrevents. Tu entendais rire le temps Dans les horloges assoupies
Personne ne savait plu bien Où commençait l’humble cuisine Ni où finissait le jardin. Ils étaient cousin et cousine. Et l’on eût juré que le ciel, A midi, n’avait qu’à étendre Sa longue nappe d’un bleu tendre Pour rendre la table éternelle.
Maurice Carême extrait de « Souvenirs »
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| | | stip ******
| Sujet: Re: Poésie Mer 20 Mar - 8:34 | |
| J'étais allée voir Ruy Blas dans un petit théâtre de fortune avec Lambert Wilson dans le rôle titre. Tout y était excellent, la grandiloquence parfois écrasante de l'écriture du grand Victor Hugo disparaissant à la scène, celle-ci donnait sa pleine mesure au génie intemporel de l'auteur. Cette colère de Ruy Blas est celle d'un peuple contre ses élites. [Ruy Blas, premier ministre du roi d’Espagne, surprend les conseillers du roi en train de se partager les richesses du royaume.]
RUY BLAS, survenant. Bon appétit, messieurs !
Tous se retournent. Silence de surprise et d'inquiétude. Ruy Blas se couvre, croise les bras, et poursuit en les regardant en face.
Ô ministres intègres ! Conseillers vertueux ! Voilà votre façon De servir, serviteurs qui pillez la maison ! Donc vous n'avez pas honte et vous choisissez l'heure, L'heure sombre où l'Espagne agonisante pleure ! Donc vous n'avez ici pas d'autres intérêts Que remplir votre poche et vous enfuir après ! Soyez flétris, devant votre pays qui tombe, Fossoyeurs qui venez le voler dans sa tombe ! – Mais voyez, regardez, ayez quelque pudeur. L'Espagne et sa vertu, l'Espagne et sa grandeur, Tout s'en va. – nous avons, depuis Philippe Quatre, Perdu le Portugal, le Brésil, sans combattre ; En Alsace Brisach, Steinfort en Luxembourg ; Et toute la Comté jusqu'au dernier faubourg ; Le Roussillon, Ormuz, Goa, cinq mille lieues De côte, et Fernambouc, et les montagnes bleues ! Mais voyez. – du ponant jusques à l'orient, L'Europe, qui vous hait, vous regarde en riant. Comme si votre roi n'était plus qu'un fantôme, La Hollande et l'Anglais partagent ce royaume ; Rome vous trompe ; il faut ne risquer qu'à demi Une armée en Piémont, quoique pays ami ; La Savoie et son duc sont pleins de précipices. La France pour vous prendre attend des jours propices. L'Autriche aussi vous guette. Et l'infant bavarois Se meurt, vous le savez. – quant à vos vice-rois, Médina, fou d'amour, emplit Naples d'esclandres, Vaudémont vend Milan, Leganez perd les Flandres. Quel remède à cela ? – l'État est indigent, L'état est épuisé de troupes et d'argent ; Nous avons sur la mer, où Dieu met ses colères, Perdu trois cents vaisseaux, sans compter les galères. Et vous osez ! ... – messieurs, en vingt ans, songez-y, Le peuple, – j'en ai fait le compte, et c'est ainsi ! – Portant sa charge énorme et sous laquelle il ploie, Pour vous, pour vos plaisirs, pour vos filles de joie, Le peuple misérable, et qu'on pressure encor, A sué quatre cent trente millions d'or ! Et ce n'est pas assez ! Et vous voulez, mes maîtres ! ... – Ah ! J'ai honte pour vous ! – au dedans, routiers, reîtres,1 Vont battant le pays et brûlant la moisson. L'escopette est braquée au coin de tout buisson. Comme si c'était peu de la guerre des princes, Guerre entre les couvents, guerre entre les provinces, Tous voulant dévorer leur voisin éperdu, Morsures d'affamés sur un vaisseau perdu ! Notre église en ruine est pleine de couleuvres ; L'herbe y croît. Quant aux grands, des aïeux, mais pas d'oeuvres. Tout se fait par intrigue et rien par loyauté. L'Espagne est un égout où vient l'impureté De toute nation. – tout seigneur à ses gages À cent coupe-jarrets qui parlent cent langages. Génois, sardes, flamands, Babel est dans Madrid. L'alguazil 2, dur au pauvre, au riche s'attendrit. La nuit on assassine, et chacun crie: à l'aide ! – Hier on m'a volé, moi, près du pont de Tolède ! – La moitié de Madrid pille l'autre moitié. Tous les juges vendus. Pas un soldat payé. Anciens vainqueurs du monde, Espagnols que nous sommes. Quelle armée avons-nous ? À peine six mille hommes, Qui vont pieds nus. Des gueux, des juifs, des montagnards, S'habillant d'une loque et s'armant de poignards. Aussi d'un régiment toute bande se double. Sitôt que la nuit tombe, il est une heure trouble Où le soldat douteux se transforme en larron. Matalobos 3 a plus de troupes qu'un baron. Un voleur fait chez lui la guerre au roi d'Espagne. Hélas ! Les paysans qui sont dans la campagne Insultent en passant la voiture du roi. Et lui, votre seigneur, plein de deuil et d'effroi, Seul, dans l'Escurial 4, avec les morts qu'il foule, Courbe son front pensif sur qui l'empire croule ! – Voilà ! – l'Europe, hélas ! Écrase du talon Ce pays qui fut pourpre et n'est plus que haillon. L'état s'est ruiné dans ce siècle funeste, Et vous vous disputez à qui prendra le reste ! Ce grand peuple espagnol aux membres énervés, Qui s'est couché dans l'ombre et sur qui vous vivez, Expire dans cet antre où son sort se termine, Triste comme un lion mangé par la vermine !
Acte III, sc. 2
Oui, c'est ça le génie.
Dernière édition par stip le Mer 20 Mar - 11:02, édité 1 fois | |
| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Mer 20 Mar - 8:43 | |
| Merci | |
| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Jeu 21 Mar - 11:06 | |
| SUR LE CIEL ÉCARLATE
Oui, les maisons étaient trop vieilles ; Les escaliers, trop hauts, Mais nous avions dans les oreilles Mille chansons d'oiseaux.
Oui, les chemins étaient trop longs Et criblés de poussière, Mais, devant nous, les horizons Frissonnaient de lumière.
Oui, nos souliers étaient trop lourds; Nos besaces, trop plates, Mais nous voyions au loin les tours Briller ainsi que des visages Sur le ciel écarlate.
Maurice Carême (extrait de souvenir)
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Sam 6 Avr - 17:01 | |
| Par monts et par mots
Il ne faut jamais dire non Au plaisir d’un bon mot Au pied de ces beaux monts Un bon mot n’est pas de trop.
Par monts et par mots Jusqu’au refuge le plus haut Par mots et par monts Une montagne, un démon.
Inaccessibles cimes Sous ma plume, les mots Inaccessibles rimes Un beau mont pour un bon mot.
Chaleur sur le chalet Des monts le soleil est si près Cyprès et verts sapins De monts, de mots, des parfums
Il ne faut jamais dire non Au plaisir d’un bon mot Des monts décrits nom de nom Des mots dont aucun n’est de trop.
Gildas Feré extrait de « Les mots décollent »
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| | | renal ******
| Sujet: Re: Poésie Dim 7 Avr - 7:43 | |
| Le poète
Vivre de sa plume Lui qui aime les oiseaux Vivre de son encre, Lui qui rêve de bateaux Tout cela semble logique Tout cela semble assez beau
Gildas Feré extrait de « Les mots décollent »
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| Sujet: Re: Poésie | |
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